Revenir à la page d'accueil ... Accéder à nos archives ... Accéder au Courrier précédent ... La Chronique de l'Europe libre

COURRIER DES LIBERTÉS SOCIALES

VENDREDI 19 SEPTEMBRE 2003

L'ÉDUCATION : UNE AFFAIRE BEAUCOUP TROP SERIEUSE...

... Pour être confiée aux pédagogues démagogues... La réponse est dans une offre diversifiée permettant le libre choix

Un récent courrier de lecteur me demandait mon avis à propos d’un sujet tout à fait emblématique du débat sur l’école. Il s’agit de l’enseignement de la langue allemande, choisie par quelque 15 % des familles seulement comme première langue et ceci contre l’intérêt pédagogique des enfants.

Sur ce sujet, je partage entièrement la préoccupation de ce professeur, ayant consacré une petite étude à cette question (1) lorsque l’on décida, Lionel Jospin étant ministre de l’Éducation nationale, d’introduire une initiation aux langues étrangères dans le primaire.

Après plus de 10 années d’expérimentation, on devrait d'abord reconnaître que cette introduction bien intentionnée était une erreur (2).

Mais il faut admettre aussi que toute l’évolution de l’enseignement des langues, en dépit d’investissements considérables en moyens financiers, et malgré de notables progrès pédagogiques, est en train de conduire à une catastrophe majeure : les jeunes Français perdent de plus en plus la connaissance des langues parlées par leurs voisins du continent européen et ils ne progressent même pas dans la connaissance de l’anglais.

Mon correspondant, cependant, suggère que l’État devrait "corriger" la tendance malencontreuse des familles à choisir l’anglais en première langue. Et si l’on se place dans la situation du "grand débat sur l’école", c’est évidemment la première idée qui vient à l'esprit de tout linguiste sérieux. Pour la plupart des enfants issus d’un milieu familial francophone, on peut considérer — ou bien que l’anglais ne sera pas parlé à la fin de leurs études secondaires, et c'est clairement le cas de la grande majorité des clients du système scolaire — ou bien qu'il s’apprend en 4 ans, bénéficiant beaucoup d’un apprentissage de 2 ans d’allemand en première langue.

Or, la description même d’un tel cursus caractérise une filière d’excellence, qui concerne globalement au maximum 3 à 5 % de la population.

Notre État égalitaire ne corrigera pas cette réalité.

Par conséquent, toutes ses interventions ne peuvent conduire qu’à abaisser le niveau des meilleurs et les plonger dans une masse entraînée inexorablement vers l’absurde "tout anglais", lui-même le plus souvent ravalé au degré de la décadence linguistique des pédagogues gauchistes américains privilégiant les formes barbares, elliptiques, etc.… Un beau gâchis.

Si on se préoccupe du renouveau de ce qu’on appelle les "langues rares" (3), du droit pour les jeunes Français de découvrir les langues anciennes, ou de la possibilité pour les familles d’accéder à l’allemand en première langue (mais aussi au russe ! etc.…), la seule vraie réponse est dans l’apparition d’une offre diversifiée permettant le libre choix.

Si on ouvre, au hasard, la célèbre et remarquable biographie de Nietzsche par Daniel Halévy, on y découvre qu’au fameux collège de Pforta, au xix siècle, tous les petits élèves futurs pasteurs luthériens apprenaient 6 (six) langues dont obligatoirement le latin, le grec et l’hébreu.

À la même époque, TOUS les futurs savants, physiciens, chimistes, etc.… étaient passés par des filières d’excellences très littéraires dans TOUTE l’Europe, et aux États-Unis, où on apprenait le latin et le grec. Cela ne semble avoir entravé aucun essor scientifique, technique, mathématique, etc.…

Au contraire, ayant subi des études mathématiques jusqu’à la licence, je me permets de poser la question suivante à mes amis lecteurs : à quoi leur a servi, dans l’existence, les fameux cas d’égalité des triangles ?

Combien d’équations du second degré ont-ils résolu dans leur vie pratique ?

Une bonne connaissance de Virgile, de Tite-Live, d’Homère ou de Platon ne leur semble-t-elle pas nettement plus fondamentale ? Ceci pour ne rien dire de la Bible et des Pères de l’Église dont sont tirées à peu près les 3/4 des sujets des œuvres d’art qu’on peut admirer dans les musées, et qu’on apprécie nettement mieux quand on les comprend.

Tout cela pour dire que l’éducation et l’instruction me semblent des choses beaucoup trop sérieuses pour être abandonnées à l’État démagogue qui cherche à se faire pédagogue.

JG Malliarakis

(1) Publiée par le défunt Choc du Mois.
(2) Je le confesse d'autant plus volontiers aujourd'hui que j'étais alors plutôt favorable à cette expérience, soutenant la préférence pour l'allemand première langue.
(3) Dans lesquelles on classe des idiomes parlés ou compris par des centaines de millions de personnes.

Revenir à la page d'accueil ... Accéder à nos archives ... Accéder au Courrier précédent ... La Chronique de l'Europe libre
    Vous pouvez aider l'Insolent ! : en faisant connaître notre site à vos amis • en souscrivant un abonnement payant