Revenir à la page d'accueil ... Accéder à nos archives ... Accéder au Courrier précédent ... La Chronique de l'Europe libre
Le Diable est monotone disaient les confesseurs dautrefois. Et le Diable protectionniste est très monotone. Et, contrairement à la réputation de Belzébuth, ce diable nest ni beau ni intelligent. Il pue Le voilà de retour avec le contentieux entre le gouvernement de Paris et les autorités européennes en charge de la concurrence, particulièrement irritées par les aides à répétition que les technocrates parisiens accordent au nain français de linformatique, la compagnie Bull.
Soulignons dabord que ce nain, sil a certainement des actionnaires français (France Télécom 17 % et lÉtat 16 %), est essentiellement tributaire des partenaires japonais et nord-américains NEC 17 %, Motorola 17 % et Dai Nippon Printing 5,3 %.
Le groupe surendetté, employant encore 8 000 salariés eux-mêmes embourbés dans des services informatiques en déclin, est le dernier vestige dune grande ambition dirigiste oubliée, le Plan Calcul.
Le Budget de lÉtat français le subventionne de manière chronique et stérile. Mais la dernière aide accordée, dun montant de 450 millions deuros, avait le caractère dun prêt qui devait être obligatoirement remboursé à léchéance de 17 juin 2003. Au-delà de cette date, le soutien étatique français apparaissait contraire à la fois aux règles de la concurrence européenne et aux engagements souscrits par le gouvernement de Paris.
Ce cas nest pas isolé. Quil sagisse dAlstom, de la SNCF, de France Télécom ou dEDF, les technocrates de Bercy nhésitent ni à enfreindre les principes communautaires, ni à piller joyeusement dans le produit des contributions des citoyens pour soutenir les réseaux dintérêts du prétendu secteur public, de ses équipes dirigeantes, de ses bureaucraties syndicales et de ses fournisseurs. Ce pacte monopoliste est présenté au public comme une sorte de grande cause nationale et on cherche à convaincre les Français quils sont liés à ces pratiques, quils doivent les soutenir comme ils sont supposés "soutenir" leur équipe nationale de football.
Le cas de Bull est évidemment le plus intéressant à observer car il est en bout de cycle : totalement exsangue, Bull préfigure la déconstruction industrielle dont les grands monopoles historiques, France Télécom, EDF ou SNCF ne donnent aujourdhui que quelques signes avant-coureurs.
On peut sillusionner naïvement encore de la constitution du géant franco-néerlandais Air France-KLM. Rien de cette illusion nest plus possible sagissant de Bull qui, de surcroît, a usé stérilement, depuis 30 ans, non seulement des subventions publiques mais également une part de la matière grise informatique formée dans les grandes écoles scientifiques françaises et gâchée par lusine à gaz étatiste. Il serait intéressant dailleurs de faire un jour courageusement le bilan de ce terrible gâchis entre le Ministère de lIndustrie, la direction de la SNCF, etc.
Dans la pratique, le contentieux Bull fait lobjet depuis le 1er octobre dune plainte déposée par le commissaire européen à la concurrence, M. Mario Monti et qui sera jugée par la Cour européenne de justice siégeant à Luxembourg. On est en face dune violation grave des règles de concurrence et ce qui avait été sauvé in extremis le 22 septembre dans les dossiers dAlstom et de France Télécom ne peut plus lêtre.
Quand donc les technocrates parisiens comprendront-ils quil est dans lintérêt de lensemble du pays, quils administrent encore, de renoncer à toutes leurs interventions ?
Le drame est en effet quils ne sont même pas corrompus au sens banal du terme : ils nont eux-mêmes aucun intéressement direct, ils n'encaissent aucun gras bakchich tangible, sur les sommes quils dilapident.
Cest plus subtil. Cest pire.
On se trouve en présence dune nomenclature de type soviétoïde. Elle n'a sûrement pas à se plaindre de l'incidence matérielle du processus de redistribution. Mais elle naccumule pas en vue de linvestissement créatif et productif. Or, ce type daccumulation productive est la nécessaire et féconde caractéristique du capitalisme, et c'est bien cela qui demeure honni de toutes les utopies étatistes dont laccouplement a engendré la technocratie française et les subventionneurs de Bull.
Vous pouvez aider l'Insolent ! : en faisant connaître notre site à vos amis en souscrivant un abonnement payant