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COURRIER DES LIBERTÉS SOCIALES

VENDREDI 24 OCTOBRE 2003

QUE PENSER DE LA RUMEUR SARKOZY ?

En regard des urgences de réforme économique...

Depuis quelques jours Paris est couvert d’affiches, au dos de tous les kiosques, reproduisant la couverture de l'hebdomadaire Le Point évoquant le duel qui serait secret, probablement aussi inexpiable entre l’actuel chef de l’État et son ministre de l’Intérieur, MM. Chirac et Sarkozy.

Vue avec un peu de recul, cette affaire peut paraître dérisoire. La vie politique est par nature le lieu d’affrontements d’autant plus "inexpiables" et d’autant plus "secrets" que les rivaux appartiennent au même camp.

Entre Mme Buffet et M. Le Pen, la divergence idéologique se suffit à elle-même. Sans engendrer nécessairement l'amour, ce fossé a probablement quelque chose de serein. Mais, au contraire, deux membres d’un même parti, outre leur cohabitation, leur intimité, leur promiscuité, éventuellement conflictuelle, sont deux chasseurs se disputant le même gibier. Leur éventuelle camaraderie est empoisonnée par ces deux phénomènes.

On appelle cela, parfois, avec une certaine emphase, le caractère "abyssal" de la vie politique. Et c’est probablement ce comportement de murènes qui rend la politique dégoûtante pour la plupart des honnêtes gens.

Il se trouve aussi que le peuple nourrit les hommes de l’État, mais que seul l’aveuglement ou la concussion peuvent donner l’impression de la réciproque. De plus, l’expérience historique millénaire nous confirme que la puissance d’une nation dépend de la prospérité de son économie, de la santé de sa population et de grands courants culturels auquel l’État contribue assez peu. Le seul gouvernement utile et bien faisant serait celui qui aurait la sagesse de se cantonner à des prélèvements fiscaux modestes et indispensables, de maintenir ou de rétablir l’ordre dans les cités ou sur les routes et de faire exécuter les contrats par une justice diligente fidèle à la devise "pacta sunt servanda" et quelques autres principes qui n'ont guère varié depuis le droit romain.

Hormis cette hypothèse, les affrontements politiciens, les intrigues de Cour, les déchirements sempiternels entre armagnacs et bourguignons, les frondes et les révolutions sont par nature des phénomènes destructeurs.

D’où vient cependant que "la rumeur Sarkozy", le "concept" Sarkozy, la faille éventuelle entre Chirac et Sarkozy, touche et trouble en ce moment des gens jusqu’ici apparemment impassibles, détachés des passions politiques ? (1)

Il y a tout d’abord la rumeur incroyable d’un 3 mandat, sans précédent depuis Jules Grévy (2) dans les annales de la république. Après Grévy, un autre président fut réélu : le malheureux Albert Lebrun, qui comme chacun sait fut amené à s’effacer par les circonstances tragiques de juin 1940. Même le général De Gaulle fut dans l’incapacité de terminer un second septennat.

L’idée de revoir, 12 ans après, les promesses gâchées de 1995, l’ancien maire de Paris residant l’Élysée pour un nouveau bail de 5 ans en 2007, non pas en tant que concierge mais en tant que p. de la r., étonne beaucoup nos partenaires européens, ne parlons même pas de nos alliés américains.

On parle donc aujourd’hui partout, comme d'un secret divulgué par un certain Pulcinella, de l’hypothèse d’un prochain gouvernement en mars.

Voir alors M. Sarkozy, qui est actuellement le ministre le plus populaire du gouvernement, accéder au rang de Premier ministre serait pour l'Élysée faire coup double.

Cela plairait dans l’immédiat à beaucoup de Français qui partagent peu ou prou, d'ailleurs, nos préoccupations tant en matière de sécurité publique que de libertés économiques.

Et cela aurait aussi pour effet paradoxal de lui barrer la route de l’Élysée pour 2007 car on n’a jamais vu un Premier ministre sortant élu président de la République.

Voilà bien, dira-t-on, des considérations purement politiques.

Car la première question, qui se pose actuellement pour la France réelle n’attendra pas 2007. Elle consiste à savoir qui peut, éventuellement, conduire dans les années à venir les réformes qu’exige son adaptation au monde actuel, à la compétition internationale et pas seulement à des règles qu’on cherche à rendre impopulaires en les mettant au débit des autorités de Bruxelles.

La vérité commande d’observer que ce réformateur ne sera certainement ni M. Chirac ni M. Juppé, ni aucun des dirigeants actuels de la gauche, qui ont tous enterré les réformes nécessaires depuis 10 ans.

Par élimination, il ne reste pas grand-chose et c’est, paraît-il, de la sorte que se construisent les grands destins.

Jean-Gilles Malliarakis

      1. Et je puis en témoigner, à ma grande surprise, pour avoir entendu sur ce thème des gens que je croyais indifférents à toute politique.
      2. On se souvient en effet que président sous la III république, successeur de Mac Mahon en 1879, Grévy, adversaire de l’élection au suffrage universel, avait été le premier chef d’État français reconduit pour un deuxième mandat, en 1885. Mais submergé, de honte par le trafic des décorations de son gendre Wilson, il dut démissionner en 1887

       

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