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BULLETIN EN TOUTE LIBERTÉ

JEUDI 15 JANVIER 2004

LE CADAVRE DE LA CGT BOUGE ENCORE

Le joli bandeau pub de L'Huma le proclame : dans un monde idéal "L'Humanité" n'existerait pas...

C'est nouveau, et naturellement, ça vient de sortir. Après la discrimination raciale, après la discrimination sexuelle, les communistes parlent aujourd'hui de la "discrimination syndicale".

Après une désaffection de plusieurs mois retrouver la lecture de l'Humanité dégage comme un petit parfum de nostalgie. C'est comme un cinéma du quartier latin où ne serait pas allé depuis des années. Entre-temps, le vieux théâtre a été morcelé en multisalles, et le prix des chocolats glacés s'est trouvé lui aussi multiplié, autant y renoncer.

Mais L'Huma, elle, sera toujours L'Huma. Mensongère, cynique, elle se révèle plus efficace que ne le croient la plupart des libéraux, elle se montre plus influente que ne l'imagine la foule des gens de la droite, elle demeure en un mot stalinienne. On a tort de ne plus s'intéresser à ses consignes. On y lit presque toujours en clair, franchement exposé dès le matin, 99 % de ce que Le Monde distillera, le soir, de manière oblique. Hélas le style est parfois lourd et la dialectique de la lutte de classes s'y étale de façon permanente, jusqu'à l'écœurement.

Reconnaissons d'ailleurs un vrai talent aux communistes. Ils ne savent plus se faire aimer pour eux-mêmes. Personne ne croit à leur "paradis socialiste", perdu avant d'être entrevu (1). Cependant, ils parviennent encore parfaitement à diaboliser leurs adversaires. Et les gens bien informés ne semblent jamais se rendre compte que cela vient des staliniens, et d'eux seulement. Ainsi en 1988 le camarade candidat Lajoignie lançait l'anathème sur la droite dite nationale, et depuis 15 ans, toute la droite institutionnelle est tétanisée par la peur de paraître liée à la prétendue (2) "extrême droite". Et, dès 1992, au lendemain du traumatisme des années 1989 à 1991, qui virent l'effondrement du bloc de l'est et la fin de la douloureuse "expérience" soviétique, le mot d'ordre s'est transféré contre "l'ultra libéralisme".

On parle donc, on écrit, on imprime, on filme, presque partout en France, – et pas seulement le Mouvement Attac, – comme si une abominable "dictature néolibérale" opprimait notre pauvre peuple.

C'est ainsi que L'Huma du 14 janvier décline les cas de cet affreux diktat

A/ La "Sécu" ne sera pas réformée démocratiquement mais par ordonnances. Cette "révélation" du quotidien coco, à en croire M. Sylvestre sur France Inter le même 14 janvier, reprend comme un scoop une dépêche de l'AFP diffusée le 12 janvier à 15 h 46, intitulée "Le gouvernement envisage de recourir en juillet aux ordonnances pour réformer l'assurance-maladie, a-t-on appris lundi de sources gouvernementales concordantes." Or, la vérité oblige à dire que si le pouvoir actuel préfère la voie des ordonnances c'est probablement plus par crainte des députés libéraux siégeant au sein du fourre-tout UMP que pour déjouer les manœuvres des socialistes, des écolos et du groupe parlementaire communiste.

B/ La SNCF est moins chouchoutée que par le passé, fait semblant de croire le quotidien stalinien. L'Huma se choque, ce 14 janvier, de voir le projet de développement du POLT reporté à 2025. C'est-à-dire qu'en clair, la liaison ferroviaire Paris-Toulouse via Limoges, le bon vieux Capitole, à grande vitesse en TGV pendulaire, sera différée. Elle interviendra après le développement de la ligne concurrente via Bordeaux, utilisant le matériel franco monopoliste Alsthom. Il faut être sot comme un communiste, – mais hélas le PCF n'a pas le privilège de cette obtusion particulière – pour ne pas comprendre la logique de cette décision. Elle a été affirmée dès le 14 décembre à l'occasion de la réunion du comité interministériel de l'aménagement du territoire (CIAT). Or, cette orientation que L'Huma trouve fâcheuse, n'est pas déterminée par une préoccupation de marché mais par une procédure de planification étatique. Si les considérations de rentabilité, donc de service, prévalaient à la SNCF et à l'aménagement du territoire (3), non seulement cela se saurait mais encore l'évolution du transport public serait tout autre.

Cela est essentiel à la veille d'un nouveau mot d'ordre cégétiste de grève ferroviaire du 21 janvier

C/ Enfin on en arrive à la fameuse "discrimination syndicale". Le drame se déroule nous dit-on à l'usine Toyota de Valenciennes. Il paraît que les méchants capitalistes nippons entravent l'action de l'excellent camarade Pecqueur, "fils, petit-fils et arrière-petit-fils de militant de la CGT." L'usine groupe l'a néanmoins embauché, "245" sur un effectif de 2 350. Curieuse discrimination. L'Huma est en mesure de souligner : "Aux dernières élections professionnelles de 2002, la CGT, présente dans le collège ouvrier, a recueilli 42,5 % des voix pour le comité d'entreprise"… mais voilà qu'il paraît que la direction de Toyota cherche à développer des syndicats plus consensuels comme CFDT, FO ou CGC. On crie donc à la "discrimination syndicale" ! Autre exemple affreux : cela se passe dans une ancienne filiale d'Alcatel, où un consultant privé aurait osé, on nous l'affirme de source sûre, proposer un projet d'intervention de nature à faire baisser l'influence cégétiste. Quelle horreur ! N'est-ce pas ? Dans quel monde vivons-nous? Qu'allons-nous transmettre à nos enfants ?

Ne désespérons pas. En 1971, il y a eu "Pleven" contre la discrimination. En 1990, la jolie loi Gayssot est venue la compléter et tout un arsenal de textes empêche, de plus en plus, tout appel à la discrimination. Et ça marche en théorie pour tout le monde, sauf bien entendu, dans la pratique, pour les préjugés qui relèvent désormais, en toute impunité, du racisme anti-français (4). Or, "la Pleven" a été votée par la droite. D'autre part, celle-ci, après avoir promis, lors des débats de 1990, qu'elle abolirait l'esclavage de la loi Gayssot, n'y a jamais touché depuis, envisageant seulement de l'aggraver. On peut donc parfaitement imaginer, venant de "droite" ou de "gauche", un nouveau texte liberticide frappant un jour la prétendue "discrimination syndicale" qui consiste simplement à vouloir instaurer dans les entreprises un climat de travail contraire à l'idéologie de la lutte des classes.

Le joli bandeau pub de L'Huma donne dans l'humour : dans un monde idéal, proclame-t-il, "L'Humanité" n'existerait pas. Certes. On conviendra qu'une telle proposition peut être interprétée dans de sens différents.

JG Malliarakis
© L'Insolent
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  1. Il ne faut pas se moquer de ce mythe et de cette nostalgie des staliniens qui savent faire oublier à certains, peut-être à la majorité des Français, la réalité du Goulag. On ne parle déjà plus de Soljenitsyne, enterré de son vivant. L'icône de Che Guevara, "fasciste de gauche", donc fasciste impuni, n'a toujours pas trouvé ses iconoclastes Déjà Fidel Castro reprend du poil de la Bête. Il fait mettre en accusation les États-Unis, sans doute coupable d'avoir démocratisé l'Amérique latine. L'Utopisme étatique anglo-saxon, tel qu'apparu en Angleterre dès l'époque des Tudors, a connu, un siècle plus tard, son "Paradis Perdu" chanté par le poète Milton. C'était l'enfer de la République cromwellienne… Or, même à notre époque, dans le monde culturel de tous les pays de langue anglaise, on fait toujours de Milton le deuxième Shakespeare. De même, Spinoza, inspirateur de l'affreux dictateur hollandais De Witt, dont il allait jusqu'à rédiger les tracts !, reste une "valeur sûre" de la philosophie. De même l'ami des révolutionnaires français Emmanuel Kant demeure "die schöne Seele" (la belle âme). Et ces réputations illusionnent ou intimident aujourd'hui encore de nombreux libéraux etc.
  2. Nous disons "prétendue" et non "soi-disant". Non seulement cette "extrême droite" ne se définit jamais elle-même comme telle ; mais encore, quand elle cherche vraiment à se démarquer doctrinalement de la droite, c'est pour s'approprier des idées et des mots d'ordre typiquement de gauche. Ces thèmes sont alors badigeonnés de tricolore. Ceci s'inscrit dans une assez invariante tradition remontant, en France, à la glorieuse épopée du général Boulanger, lui-même homme de gauche et des plus sectaires, sauf à endosser les chèques de la duchesse d'Uzès. On consultera à ce sujet le Tome II des Responsabilités des Dynasties bourgeoises de Beau de Loménie.
  3. Un "marché" met en présence un fournisseur et ses clients : le Comité interministériel de l'aménagement du territoire ne "fournit" pas grand-chose et ses "clients" ne sont guère entendus.
  4. On appelle cela "discrimination positive"
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