BULLETIN EN TOUTE LIBERTÉ
LUNDI 9 FEVRIER 2004
SYNDICALISME SUBVENTION ET SUBVERSION
Vous avez aimé Blondel : vous adorerez Mailly.
Sur un forum d'enseignants, cette question assez désarmante frappe aujourd'hui mon attention :
Or l'actualité, si riche en non-événements des 5, 6 et 7 février dans notre beau pays aurait pu lui donner des éléments de réponse factuels avec la triste mise en examen de M. Luc Guyau ancien président de la FNSEA et la conclusion provisoirement glorieuse et dangereusement unanimiste du 20e congrès de Force ouvrière.
Tout d'abord quand on observe la réalité des bureaucraties syndicales françaises, qu'elles soient théoriquement paysannes ou ouvrières, quelles soient qualifiées par l'AFP comme étant philosophiquement animées par des "anciens de la Jeunesse agricole chrétienne" ou de "membres du Grand-Orient de France", qu'elles paraissent politiquement "à droite" ou "à gauche", on doit reconnaître, en toute objectivité, qu'elles fonctionnent de la même manière.
Que Blondel réussisse à quitter son poste sans avoir été vraiment égratigné par la justice, ou que M. Luc Guyau se voit aujourd'hui traîné dans la boue dans une affaire de détournement des aides européennes et hexagonales, pain quotidien de sa corporation, n'est pas le problème.
L'asymétrie, provisoire et même fugace, peut parfaitement changer de sens.
Que la FNSEA paraisse un allié constant des pouvoirs publics est même, d'un certain point de vue, trompeur. Les 5 et 6 février, par exemple, Le Parisien, journal fort habile, publiait un dossier très instructif sur l'affaire. À sa lecture, tout le monde comprenait que la magistrature syndiquée semble s'acharner, d'abord contre Guyau, tout en fourbissant ses armes contre d'autres dirigeants. Ceux-ci sont moins connus du grand public, mais ils se révèlent néanmoins, plus représentatifs encore du système corporatif agricole français.
Or, pour souligner le caractère institutionnel de la FNSEA, à qui Le Parisien donne-t-il la parole ? À M. José Bové, dont il était clair dès son apparition sur la scène médiatique, et dont les faits ont toujours confirmé, qu'il était un produit de la classe politique ! La Confédération paysanne est une concurrente assez artificielle de la FNSEA, et sa propre existence a toujours été grassement subventionnée. Ce n'est d'ailleurs pas à la requête de la Confédération gauchiste, mais sur la demande d'un tout autre mouvement, la Coordination Rurale. Et, en toute objectivité sur les divers articles publiés, les 5 et 6 février, par Le Parisien, s'ils contiennent un entretien avec Bové, aucun n'explique le point de vue de la Coordination rurale, jugée sans doute trop droitière par la rédaction.
Citons exactement l'AFP du 5 février :
À défaut de donner la parole à la Coordination Rurale ou à l'Organisation des producteurs de grains, le journal régional d'Ile-de-France aurait pu s'intéresser aux travaux de la Cour des comptes de 1998 : il ne le fait que de manière très indirecte, citant très vaguement un "proche du dossier". Autant employer une expression comme "de source sûre" ou "selon les milieux bien informés" (2).
Nous n'écrivons donc pas ces choses-là pour stigmatiser spécialement Le Parisien : c'est un des moins mauvais titres de la presse française actuelle. Au moins parle-t-il de l'affaire ! Mais ses rédacteurs, en toute honnêteté, sont imbibés des mêmes préjugés que la quasi-totalité des médiats. Peut-être même s'agit-il de montrer un monde agricole pour lequel les lecteurs franciliens ont le sentiment de supporter, comme citadins, le poids de subventions, détournées par de "gros combinards" et autres "riches céréaliers", auxquels ne s'opposeraient seulement que quelques gauchos romantiques à la Bové.
Or les idées de la direction conformiste de la FNSEA ont été dans le passé aussi subversives que celles des gens du Larzac : elles remontent à une autre époque, celle du productivisme, celle du statut du fermage et des Safer, celle des anciennes politiques agricoles hexagonales. Ce sont ces idées qui ont dépeuplé la France rurale.
La vérité est aussi que les combinards et les subventionnaires sont également "à gauche", baignant dans un trotskisme à peine différent de celui de Bové, et c'est bien entendu le cas de Blondel, stérile démagogue auquel succède un sinistre apparatchik issu de la même secte.
À ceux qui s'étonnent donc du désamour des Français pour toutes les bureaucraties syndicales, quelle qu'elles soient, nous suggérons donc un regard objectif sur les faits.
Vous avez aimé Blondel : vous adorerez Mailly.
(1) Nous l'avons écrit dès l'époque de ses frasques à Millau.
(2) Ces formules un peu démonétisées suggérent, la première, que les sources journalistiques sont moins certaines que ne le pensent les lecteurs ou, la seconde, que ces mêmes gogos, clients en voie de raréfaction d'une presse déliquescente, sont précisément mal informés
Vous pouvez aider l'Insolent ! : en faisant connaître notre site à vos amis en souscrivant un abonnement payant