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BULLETIN QUOTIDIEN EN TOUTE LIBERTÉ
MARDI 17 FÉVRIER 2004
RIEN DE MOINS RÉGIONAL QUE LES ÉLECTIONS À VENIR
Toutes les conditions se trouvent réunies pour une montée en puissance de mécontentements massifs
Pour quelques semaines, jusquaux 21 et 28 mars, la France va se retrouver plongée dans une campagne électorale pour le moins paradoxale. Il sagira délire, en théorie des assemblées régionales et départementales, selon deux modes de scrutin parfaitement contradictoires.
Un mot dabord des élections cantonales, dont les gros médiats se moquent. Renouvelant pour moitié les conseils généraux, elles ne traduisent que des évolutions lentes et elles maintiennent lillusion dune France rurale, gérant ses subventions, consommant ses rentes et distribuant aux vieillards la prestation sociale dépendance. Il ne faut pas cependant en sous-estimer la fonction. Cette structure départementale permet au pays légal dencadrer le pays réel et notamment dempêcher les régions vivantes dexister.
Car, sous le nom de régions, ce sont exclusivement 22 subdivisions factices de lhexagone jacobin qui vont assembler leurs comices. Lenjeu sera, national. Les règles ont été édictées par le pouvoir central, qui les a renouvelées encore en avril 2003, afin de renforcer une politique artificielle de verrouillage, initiée par le gouvernement Jospin sous le nom de "49-3 régional".
Le mode de scrutin sinspire de la proportionnelle bâtarde des élections municipales.
En vérité, le concept de prime à la liste majoritaire qu'on y appliquera fut inventé en Italie après 1922. Il a fait beaucoup démules dans les pays qui nont pas le courage de pratiquer
Ce mode délection, sil se généralise, combine les tares de lingouvernabilité à celles de la dictature rampante, via cet unanimisme crétinisant, dont les historiens du futur trouveront la trace dans le discours du président sortant le 21 avril 2002 osant prétendre dire, fort de moins de 20 % des suffrages exprimés, ce que "nous pensons tous".
On veut nous imposer des choix strictement binaires, pensés par les états-majors parisiens et leurs communicateurs. Cette logique peut se concevoir dans un cadre totalement national. Elle est un peu outrecuidante dans le contexte européen.
Elle est surtout contraire à lidée même dun pouvoir régional.
Quand nous observons le feuilleton des préparatifs, semaine après semaine, nous voyons dabord lélimination, le retrait, la marginalisation des régionalistes. (1)
Bien plus, on a vu un appareil dÉtat dont le chef a fait pendant 30 ans une double carrière délu départemental en Corrèze et de magistrat municipal à Paris prétendre interdire à un élu régional depuis 12 ans en Provence de se présenter dans une région dont le peuple risquerait de lélire (2).
Il est révélateur de notre démocratie quelle soit incapable dappliquer ou régulariser les lois électorales, discrètement décisives comme celles qui régissent en pratique les chambres professionnelles ou les caisses sociales, sans parler de la vie associative. Il paraît quil ne faut surtout pas toucher ainsi à la Loi de 1901, de même quil ne faut pas appliquer la Loi de 1950 sur lélection des organismes de sécurité sociale et dallocations familiales. Mais chaque année ou presque, depuis 20 ans, on change les règles des élections politiques.
Or, le texte davril 2003, y compris après le recours exceptionnel à larticle 10 de la Constitution de 1958, a encore pour fonction de renforcer le caractère national de ces élections.
Et, chose assez remarquable, on naura jamais tant rencontré de réticences dans lapplication des consignes nationales : dans près de la moitié des régions les socialistes ne sont pas parvenus à saccorder avec leurs alliés verts ou bien avec les survivants du stalinisme barricadés dans le bunker de Mme Buffet. Même difficultés pour les accords UDF/UMP. Partout aussi : rupture ouverte entre la gauche et lextrême gauche.
Toutes les conditions sont donc réunies pour une montée en puissance des mécontentements massifs et des rejets.
La dérision même de ces pouvoirs régionaux manipulés par ladministration centrale et les états-majors parisiens en sera une donnée supplémentaire.
JG Malliarakis
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(1) Nous ne saurions appliquer ce terme de "régionalistes" aux séparatistes et aux mini-jacobins de lÎle de Beauté dont le slogan est "I Francesi Fora" et dont le programme tend à imposer la langue corse àceux qui ne la parlent pas. En dehors de lAlsace, où Alsace dabord a heureusement des chances de maintenir sa représentation, aucune formation régionaliste ne subsiste.
(2) Cest vrai dailleurs : M. Le Pen est natif du Morbihan et non des Alpes-Maritimes. Cest là son moindre défaut. Et si lon devait imposer à chacun, en France, de vivre, de travailler, de voter dans son douar dorigine on peut même imaginer que son parti se trouverait ramené à son score de 1974 avant linstauration du regroupement familial. Il aurait fallu empêcher M. Le Pen dêtre étudiant à Paris, pupille de la nation, interdire aux habitants du Quartier Latin de lélire en 1956 et 1959, lui refuser daller porter luniforme de la France en Indochine, en Algérie et à Suez etc Revenir à la page d'accueil ... Accéder à nos archives ... Accéder au Courrier précédent ... Utiliser le Moteur de recherche
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