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BULLETIN EN TOUTE LIBERTÉ

MERCREDI 3 MARS 2004

PUISQUE BUSH PEUT PERDRE

Le "mystérieux" Kerry est assurément pire

Il serait totalement ridicule, à 8 mois du scrutin présidentiel américain, de formuler un pronostic alors même qu’on sait tout juste, au lendemain du fameux "grand mardi" 2 mars, quel sera le candidat du parti démocrate.

En effet l’élection de l’an 2000 s’est jouée à quelques centaines de bulletins incertains dans l’État de Floride et l’on ignore, par exemple, le rôle qui sera tenu par l’avocat des consommateurs Ralph Nader, 3 homme du précédent scrutin.

On sait en revanche que, cette année, les républicains peuvent perdre.

Mais ce ne sera pas pour les raisons fantasmatiques avancées par les médiats français.

La raison essentielle du succès ou de l’échec d’un président sortant aux élections américaines repose sur le sentiment de sa réussite, ou au contraire de sa nuisance, sur le terrain économique. Bush père avait perdu face à Clinton parce que les finances et les entreprises américaines se portaient mal, en dépit de son succès dans la première guerre contre l’Irak en 1991. Aujourd’hui certains Français semblent tirer argument de la situation dans laquelle la Coalition leur paraît se trouver dans les sables de Mésopotamie. Cette appréciation géostratégique est sujette à révision : par exemple les attentats sanguinaires, monstrueux, commis par les gens de la mouvance Al-Qaïda, contre les lieux saints chiites en pleine fête de l’Achoura, sont plutôt de nature à justifier et renforcer la politique d'intervention au Moyen Orient et le rapprochement esquissé avec l'Iran.

Mais précisément, pour le corps électoral qui votera effectivement en novembre, là n’est pas la question.

Depuis janvier 2001, le nombre des emplois dans l’économie américaine a diminué de 2,3 millions. Pendant le même temps, le Budget fédéral des États-Unis est passé d’une situation excédentaire à un déficit de l’ordre de 500 milliards de dollars. Il n’est pas certain que tout cela soit entièrement dommageable à la prospérité du pays.

Il n’est pas non plus impossible que les signes de reprise, sensibles depuis plusieurs mois, soient suffisamment convaincants en octobre 2004 pour permettre à Bush et à son équipe de démontrer qu’ils ont gagné leur pari.

Ce qui est significatif en réalité c’est que les responsables de la campagne présidentielle en vue de sa réélection ont analysé que le scrutin se jouera dans 17 états. En vue de la désignation de ces grands électeurs, qui peuvent donner la victoire à tel ou tel camp, l’accent sera mis sur les faiblesses du candidat Kerry et de son programme.

Souligner les points faibles de cette plate-forme, encore imprécise ne devrait pas être trop difficile. Ce que l'on en sait dès à présent nous la montre, pour parler français, entièrement "bidon".

Il est, en réalité, atterrant que Kerry semble bénéficier, en France, de la faveur des médiats. Il est vrai que l’intelligentsia française est informée par des journaux comme le Nouvel Observateur, lequel vient de publier un "dossier" (1) complètement délirant, réalisé par M. Slimane Zeghidour faisant état d’un véritable complot protestant "évangélique" mondial dont Bush serait l’instrument. Alors, forcément, le "catholique" Kerry leur devient sympathique et souhaitable.

À lire une telle prose, dans un des deux ou trois journaux représentatifs de la pensée unique française, ces "évangéliques" seraient passés du nombre de 4 millions en 1940 à 500 millions sur 2 milliards de chrétiens de nos jours. On comprend mieux maintenant pourquoi les lecteurs du Monde et du Nouvel Observateur ne prennent jamais le métro : ils ont peur (2). D’autant que la consommation de ces médiats ne leur permet pas de distinguer un protestant d’un catholique voire d’un orthodoxe…

En vérité, tout cela, ce sont des fantasmes.

Le vrai danger, tant aux États-Unis qu’en Europe, ce n’est pas le fondamentalisme protestant mais hélas plus prosaïquement la montée de la démagogie protectionniste.

M. Brink Lindsey, du Cato Institute, explique clairement cette montée en puissance : "Le moyen le plus sûr de tirer un avantage électoral de cette hémorragie d'emplois, due surtout à la récession et aux gains de productivité (...), est d'accuser la concurrence étrangère"

John Edwards, rival malheureux et postulant pour la vice-présidence met la pression en faveur de cette rhétorique protectionniste, comme le faisait aussi Howard Dean. "Si j'avais été alors au Sénat j'aurais été contre l'Alena". Car en 1993 John Kerry, au Sénat, avait voté en faveur de l'Accord de libre-échange nord-américain avec le Canada et le Mexique. Mais il dénonce aujourd'hui les délocalisations et promet, s'il est élu, de chercher "à réviser les accords commerciaux et d'éliminer les incitations fiscales aux entreprises pour exporter des emplois". Tous les politiciens américains connaissent le danger de ces guerres commerciales, auxquelles un Pascal Lamy menace de recourir en Europe.

Mais s'ils commencent sur le terrain de telles promesses, on peut légitimement en redouter l'escalade, désastreuse pour les intérêts français.

Et sur le terrain protectionniste, si Bush a pris quelques mesures que nous désapprouvons, le "mystérieux" Kerry est assurément pire.

Il faut en prendre conscience.

JG Malliarakis

© L'Insolent

    (1) Nouvel Observateur du 26 février.

    (2) Leur but, affirme le savant dossier, "liquider l'Islam". Il paraît que 150 missionnaires évangéliques seraient à l'œuvre au Maroc et qu'ils ont "pignon sur rue en Algérie". On frémit…

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