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BULLETIN EN TOUTE LIBERTÉ

MARDI 30 MARS 2004

PAYSAGE SYNDICAL ET BLOCAGES DES REFORMES

Chérèque et la CFDT soutiennent les réformes : mais quelles "réformes" ?

La société française est autant plombée par l’étatisme de la droite que par celui de la gauche

En même temps que la campagne des élections régionales se déroulait, le 25 mars, un scrutin corporatif bien représentatif du climat social et politique français : les élections professionnelles de la SNCF.

Tout d’abord on doit noter que ce vote s’inscrivait dans une situation paradoxale du monde du travail français, de plus en plus nettement séparé entre :

Dans le secteur concurrentiel, un syndicat monte c’est la CFDT de M. Chérèque, qu’il s’agisse des assurances ou des chantiers navals. Aux chantiers de l’Atlantique, où la question du maintien des emplois français face à la concurrence mondiale ne saurait être résolue ni par la surenchère à la lutte des classes ni par des subventions éternelles (et les ouvriers le savent), la CFDT vient de gagner 6 points.

En revanche, dans le secteur strictement étatique, c’est la CGT qui se développe. À la SNCF, lorsque le communiste Fiterman est passé au ministère des Transports (gouvernement Mauroy 1981-1983) alors que le PCF et la CGT reculaient partout, il est parvenu, par une manipulation réglementaire, à centraliser les œuvres sociales ferroviaires et à les confier aux cégétistes, comme il en va de même à EDF.

Et le 25 mars, la CGT a encore avancé de 5 points chez les cheminots passant de 42 à 47 %.

La crise des retraites, autour du projet Fillon du printemps 2003, a même permis au communiste Thibault, chef plébiscité à l’unanimité de la CGT, de récupérer une frange non négligeable de militants CFDT de la fonction publique.

Cela s’est traduit par un effondrement assez spectaculaire de l’implantation réformiste dans les chemins de fer (- 9 points) et dans la fonction publique hospitalière (- 6 points).

Le paysage syndical français dans les grandes entreprises apparaît donc schématiquement partagé entre :

Ceci met mieux en perspective la dissociation des deux centrales, l’une au discours archaïque-révolutionnaire hostile à toute réforme (1), l’autre acquise à la réforme Fillon dont la seule disposition novatrice en 2003 consistait à égaliser (en partie seulement) retraites publiques et retraites privées.

Mais on doit bien souligner aussi que l’esprit de la CFDT, comme celui des bureaux rédacteurs de la réforme Fillon, demeure embrumé par le modèle de la grande entreprise. L’entrepreneur individuel ne les intéresse pas (2).

Il ne suffit donc pas de s’inquiéter de l’incidence des élections régionales du 28 mars et du remaniement gouvernemental prévisible subséquent sur la volonté de réforme.

Il faut aussi s’interroger sur la pertinence des "réformes" projetées.

Aligner les régimes sociaux du travail indépendant et de la très petite entreprise sur le système des conventions collectives et du paritarisme, c’est évidemment fourvoyer l’esprit de réforme.

Alourdir la barque des jeunes pousses entrepreneuriales, en ne faisant que repousser leurs charges à la 3 année, alors qu’il faudrait les alléger pour tous, c’est tourner le dos à l’esprit même de liberté.

Il appartient sans doute à des historiens et à des sociologues de bonne foi de s’interroger sur les racines (3) de la réticence française vis-à-vis des libertés humaines et sociales concrètes.

Au total, la société française est autant plombée par l’antilibéralisme de la droite que par celui de la gauche.

Rappelons ainsi que le septennat de Giscard a vu les prélèvements obligatoires augmenter de 1 point par an : 7 au total.

Soulignons également que les réformes ratées ou sabotées font plus de mal à l’idée libérale et régionaliste qu’une franche politique de gauche. Si en toute démocratie, à un moment donné, les Français votent à 51 % pour plus de "social" socialiste, c’est une erreur sans doute, mais il est préférable, dans les limites de la liberté d’opinion et de l’alternance démocratique, de voir se dérouler ce type d’expérience "socialiste" (4) que de supporter le socialisme "de droite".

Car c'est ce dernier qui empêche de mesurer les véritables effets positifs de la Liberté.

JG Malliarakis

©L'Insolent

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(1) Comme en 1926-1928 leurs ancêtres de la CGTU communiste combattaient "la loi fasciste des assurances sociales".

(2) La nouvelle loi prévoit même d’instituer une retraite complémentaire obligatoire nouvelle pour les commerçants et artisans. Non seulement cette disposition est absurde, dans un contexte d’effondrement des régimes de bases, mais elle tend à créer un nouveau prélèvement obligatoire pour des professions déjà lourdement pénalisées par le système.

(3) Il ne suffit pas d'évoquer en la matière l’héritage d’Ancien Régime. La manière dont la Terreur de 1793-1795 ou l’Épuration de 1944-1945 ont abusé, — pour ne pas dire : prostitué, — le mot de "liberté", n’y est pas non plus étrangère. Mais il existe peut-être, et même sûrement, d’autres pistes, par ex. L’anthropologie pernicieuse des "Lumières" ou même la marque du jansénisme dans la culture catholique française et surtout l’influence du marxisme et la complaisance vis-à-vis du totalitarisme tout au long du xx siècle.

(4) Cette expérimentation a été faite en 1981-1983, 1988-1995, 1997-2002. Avant même parfois les échéances électorales le pays en a mesuré clairement l’échec.

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