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BULLETIN EN TOUTE LIBERTÉ

MARDI 15 JUIN 2004

LES VAINCUS FONT LA LOI…

Trois gouvernements battus vont conduire la synthèse sur la Constitution européenne

Les résultats du scrutin européen du 13 juin méritent d’être observés à froid, objectivement et attentivement. Ils sont exactement le contraire de ce que disent les commentateurs agréés.

Tout d’abord, si 55 % des Européens — et notamment 57 % des Français — se sont abstenus, ce n’est pas sans raison. Mais ce n’est pas non plus un signe radical de désaveu vis-à-vis de la construction européenne. Après tout, depuis plus de 200 ans, la constitution fédérale des États-Unis n’a jamais été mise en péril par des taux d’abstention pourtant très élevé.

Les citoyens savent en Europe, ou croient savoir, depuis 1979, que le parlement de Strasbourg n’est encore qu’une pièce expérimentale et symbolique du dispositif. La prise de décision s’effectue ailleurs : cela changera sans doute le jour où un Traité constitutionnel renforcera cette assemblée. Ce n’est pas encore le cas.

D’autre part, les manipulations du mode de scrutin ont été, surtout, le fait de la loi franco-française divisant artificiellement l’Hexagone et l’Outremer en 8 circonscriptions arbitraires.

Mais même dans ce cas les écarts de représentation sont faibles : 31 socialistes sur 78, soit 39,7 % des sièges avec 28,8 % des voix, 3 villiéristes soit 3,8 % des sièges avec 6,7 % des voix, 7 frontistes soit 8,9 % des sièges avec 9,8 % des voix. On a vu pire.

Au total, l'assemblée élue n’est pas loin de représenter prisme réel des suffrages, sur l’ensemble des 25 États-Membres.

Les médiats ont beaucoup insisté sur les courants d’opinion pittoresques ou les taux d’abstention extrêmes de certains pays d’Europe centrale. 83 % de Slovaques qui vont pêcher à la ligne dans le beau Danube bleu, c’est évidemment considérable. 14% de voix pour les souverainistes suédois (3 sièges sur 19) ou 10 % pour "l’autodéfense" agricole polonaise (7 sièges sur 54, et 5 position), quels scores inattendus ! Et que dire de la Lettonie, seul pays en Europe où la droite "nationaliste" arrive en tête avec 29,8 % des voix (1) ? Etc…

Mais là aussi, il faut observer le total : les partis dominants du prisme politique, allant des socialistes au centre droit ont obtenu 581 sièges sur 732, les communistes et l’extrême gauche 36, et l’ensemble des contestataires, nationalistes, souverainistes, "populistes", incluant les eurosceptiques britanniques, sont en tout 115.

De plus, et c’est probablement le point essentiel, cette assemblée a été portée par une vague globalement à droite : au départ, les 272 élus de centre droit sous la bannière du PPE et les 66 libéraux "centristes" dominent largement les 201 socialistes et les 42 verts.

C'est logique car les thèmes des campagnes de gauche sur l’Europe dite "sociale" ont été rejetés par les électeurs.

Simplement, dès le 1er jour on a pu constater que ce vote (2), risque d’être démenti par certaines démarches obliques. Certains "verts" (Cohn-Bendit) et "centristes" (Romano Prodi) tendent à débaucher certains élus PPE, etc… et cela ne fait que commencer.

Après tout, la liste UDF avait inscrit dans son programme, si "correct" par ailleurs, l’idée d’une "harmonisation fiscale". Avec cette doctrine ambiguë, on peut aller très loin.

Plus surprenant est le fait que, dès le 18 juin, on devrait sortir d’un chapeau les résultats d’une négociation, très obscure, entre les gouvernements, à propos de la Constitution européenne.

Or, tout de même, l'indication, du scrutin européen du 13 juin, examiné pays par pays, c’est le désaveu par l’opinion publique au plan interne de chaque État-Membre, d’un nombre impressionnant du gouvernement.

Et cela touche particulièrement les 3 principaux protagonistes de la négociation.

- le parti de M. Blair a obtenu 22 % soit 15 points de moins que les conservateurs britanniques ;

- le parti de M. Chirac a obtenu 17 % soit 11 points de moins que les socialistes français ;

- le parti de M. Schroeder a obtenu 21%, soit 15 points de moins que la droite allemande.

Et ce sont ces trois gouvernements battus qui vont conduire la synthèse d’un texte, dont ples peuples n’ont pratiquement pas eu connaissance au quotidien.

On nous dira que le désaveu qu’ont subi ces gouvernements est ordinaire dans des scrutins intermédiaires (3). On fera semblant de nous dire que les désaccords intérieurs ne portent pas sur la Constitution européenne. Etc…

C’est tout de même un fait : l’Europe des États, l’Europe intergouvernementale, continue de mener le jeu.

Le Parlement européen, depuis 25 ans, demeure une institution secondaire.

Il se peut, certes, que les choses évoluent plus vite qu'on ne l'imagine, et qu’elles évoluent dans le sens de l’Europe des Libertés.

C’est certainement souhaitable, ce n’est pas acquis. Les technocrates et les gardes chiourme intergouvernementaux n'ont pas dit leur dernier mot.

JG Malliarakis

©L'Insolent

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(1) La droite tchèque qui arrive en tête avec 30%  n’est qualifiée par le Monde que de "nationale".

(2) Certes sans "grand enthousiasme" : on ne prend pas la Bastille tous les jours et ça vaut peut-être mieux.

(3) Mais en fait les chiffres battent tous les records.

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