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BULLETIN EN TOUTE LIBERTÉ

MERCREDI 24 NOVEMBRE 2004

FACE À UNE DÉMARCHE CHIRAQUIENNE TYPIQUE

On ne peut compter que sur la mobilisation des adversaires de l'entrée des Turcs en Europe,

et c'est pourquoi nous soutenons la manifestation (4) du 5 décembre.

Le quotidien de la pensée unique l'annonce désormais :

"La France souhaite que les dirigeants européens évoquent dans les conclusions de leur sommet de Bruxelles la possibilité d'une ‘alternative‘ à l'adhésion pure et simple en cas d'échec des négociations avec la Turquie, a-t-on appris, lundi 22 novembre, de source française."

Ainsi donc, 40 ans après l'accord d'association entre la Turquie et le marché commun de 1963, 10 ans après l'union douanière obtenue par Ankara en 1993, M. Chirac, — pardon : la France, — réfléchit.

Cette bonne, cette excellente nouvelle nous a été diffusée par Le Monde du 23 novembre, sous le titre "la France cherche une alternative à l'adhésion pure et simple de la Turquie".

Le fond du problème qui se pose au ci-devant maire de Paris, ancien conseiller général de Corrèze, s'articule pour lui de la manière suivante.

1° Lui-même est ce qu'on peut appeler un partisan de l'adhésion d'Ankara. Au fond, il n'a jamais réfléchi aux conséquences réelles et complexes de cet élargissement de l'Union européenne à l'Asie mineure. Il est "pour", de principe, comme il devait, jeune officier français en Algérie, être "pour" l'intégration en 1958, puis "pour" le plan de Constantine de 1959, puis "pour" l'idée d'autodétermination lancée en 1960, puis "pour" les accords signés par la France à Évian en 1962, mais que le gouvernement algérien n'a jamais reconnus. Tout cela dans la même foulée, et en vertu des mêmes considérations, toujours péremptoires.

2° En réalité, la candidature de la Turquie à l'Union européenne fonctionne à plusieurs niveaux. Dans le cas de l'Élysée, "on" y a soutenu cette affaire, en partie en considération de relations économiques nouées par de grosses structures monopolistes franco-françaises avec leurs homologues turcs. Lorsqu'il était à la tête de la Lyonnaise des Eaux, M. Jérôme Monod "misait" sur la Turquie. Ses convictions "laïques" ont fait le reste, et elles sont à l'œuvre dans l'entourage de M. Chirac.

3° Seulement voilà. Le débat relatif à cette adhésion prend, en Europe, un tour différent de celui qui a empoisonné, en France, toute réflexion sereine sur l'immigration. En décembre 1999, à la sortie de la présidence finlandaise du Conseil européen d'Helsinki, M. Chirac croyait pouvoir faire "porter le chapeau", du refus d'accepter les Turcs, aux très méchants Grecs. "Nos amis Grecs", disait alors M. Chirac, sont (seuls) responsables des difficultés avec la Turquie. (1)

4° Simplement, il se trouve que le gouvernement d'Athènes a choisi, pour des raisons qui lui sont propres (2), de ne plus être au centre du débat. Autrement dit, Chirac doit prendre ses responsabilités. Il se trouve en face de cette obligation, plus que d'autres, parce qu'il s'est lui-même, de façon excessivement frivole, engagé dans le processus.

5° Et maintenant, il doit agir vite. Ayant promis, pratiquement seul en Europe, un referendum en 2005 sur la Constitution européenne, il n'ignore pas que la masse des Français assimile les deux affaires, théoriquement et juridiquement disjointes. L'hypothèse d'une Europe englobant la Turquie risque de faire capoter la procédure référendaire pour des motifs entièrement irrationnels.

Il faut donc rassurer.

Et on nous sert une "autre solution" que l'adhésion, qui pourrait prévaloir dans 4 ou 5 ans, M. Chirac n'étant plus président.

Ce serait un "partenariat privilégié". L'expression a été utilisée par d'autres, par la droite allemande, par M. Bayrou, etc.

Ankara ne veut pas de cette solution, tout simplement, d'abord, parce que les Turcs en bénéficient déjà.

Outre que, sur 165 États souverains extérieurs à l'Union européenne, il y a 165 partenaires privilégiés qui bénéficient d'accords qui leur sont propres depuis 40 ans, parmi donc ces 165 privilégiés, la Turquie est un des plus privilégiés.

M. Chirac ne le sait peut-être pas, mais une femme ne peut pas être "un petit peu" enceinte.

La question qui se pose est de savoir si les Européens acceptent ou n'acceptent pas d'être les compatriotes et les concitoyens d'un État, dominé par les militaires, qui s'appelle la Turquie.

La réponse à cette question est très simple. C'est non dans la langue de Molière, de Voltaire et de Victor Hugo. (3) Nous ne devons pas faire confiance aux hommes de l'État et aux diplomates pour exprimer cette opinion populaire.

Nous ne pouvons dans cette affaire, compter que sur la montée en puissance de la mobilisation des adversaires de l'entrée des Turcs en Europe, et c'est pourquoi nous devons soutenir la manifestation (4) du 5 décembre.

JG Malliarakis

©L'Insolent

(1) Et il pensait, sans doute, que cela marcherait au niveau européen, comme fonctionne en France, l'argument qui consiste à expliquer les problèmes des banlieues par l'existence du front national. Au pays de Descartes, il serait plus logique de dire, au contraire, que le vote FN s'est expliqué depuis 20 ans, notamment, par les problèmes des banlieues. Pas l'inverse. De même, l'attitude de la Grèce, jusqu'en 1999, s'explique par les réalités quotidiennes de son voisinage avec la Turquie, et non le contraire. En l'occurrence, l'Europe est parfois plus cartésienne que la France. Il est vrai que Descartes lui-même était édité en Hollande.

(2) Notamment parce que la question essentielle, pour la Grèce, était de faire admettre la République de Chypre comme membre de l'Union. Le gouvernement d'Athènes soutient désormais, ingénument, sincèrement, très sincèrement j'en suis convaincu, l'hypothèse, enthousiasmante… si elle pouvait se concrétiser, de la "Turquie européenne". Cet idéal semble, sur le papier, assez voisin de celui de l'Algérie française, qui avait pour lui, cependant, l'héritage de 130 ans de présence française, la présence d'une importante population d'origine européenne, l'adhésion d'une partie non négligeable de la population de souche nord-africaine, les engagements "irrévocables" des représentants de la France et de l'Armée, les dispositions explicites du Pacte atlantique de 1949, et qui, malgré tout cela, a été écarté par l'Histoire.

(3) On peut aussi le dire dans la langue de Cambronne.

(4) Diverses associations (France-Europe-Avenir, Breizh 2004, le Comité Lépante, le Club Courbet, la Droite Libre, Europaegentes, etc. On peut s'adresser à Franceuropavenir@club-internet.fr)
proposent en effet de participer à une

Manifestation Nationale à Paris Champ de Mars, côté École Militaire
Dimanche 5 décembre à 14 h 30
Sur le thème "NON à la TURQUIE DANS L'EUROPE !"

On y chantera sur une mélodie française que chacun connaît :
"Frère Jacques (bis)/ La Turquie(bis)/
Ce n'est pas l'Europe (bis)/ C'est l'Asie(bis)…"

À NOTER AUSSI :

Une importante pétition circule sur le net, qui se propose de recueillir un million de signatures avant le 16 décembre
"DANGER IMMÉDIAT Jacques Chirac veut faire entrer la Turquie en Europe. Ensemble, arrêtons-le !"
À l'origine de cette campagne, se trouve la Fondation de service politique qui déclare :
"demandons un referendum sur l'adhésion de la Turquie à l'Union européenne avant de commencer les négociations. Signez et faites signer la lettre ouverte que nous adresserons le 16 décembre au Président de la République : je veux signer la pétition"
(Note de l'Insolent : ce referendum n'a d'intérêt que s'il est immédiat, préalable à celui qui nous est annoncé sur la Constitution européenne. Attention en effet : "promesse de referendum ne vaut pas referendum" et promesse de M. Chirac ne vaut pas grand-chose...).