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BULLETIN EN TOUTE LIBERTÉ

MARDI 18 JANVIER 2005

BAGAGES D'ESPOIRS

Pour sortir de nos misérables débats hexagonaux.

1. Bagages...

Si j'ignorais l'ironie profonde de l'Histoire, j'éprouverais aujourd'hui moins de plaisir à l'idée de partir quelques jours pour la Chine.

Cet immense pays, assurément passionnant, fait aujourd'hui figure, à tort ou à raison, aux yeux de certains, de porte égide de la liberté des échanges, peut-être même de ce qu'on appelle "l'ultra libéralisme". Aux yeux des autres, sans doute moins optimistes, il demeure encore, à tant d'égards, le dernier grand refuge d'un système totalitaire d'oppression communiste, de parti unique producteur de sa propre déculturation. La mort de Zhao Ziyang vient de nous administrer à ce sujet une piqûre de rappel.

Enfin, c'est promis, en revenant je vous dirai ce que je pense de la taille du portrait de Mao Tsé-toung sur la porte de la Paix Céleste.

Mais il n'est pas besoin de se déplacer si loin. Car un autre exemple de l'ironie dialectique de l'Histoire est à portée de TGV.

C'est le gouvernement suisse, en effet, qui le premier, au XIXe siècle, a lancé l'idée d'une réglementation internationale du Travail. Aujourd'hui, cette conception semble tellement utopiste que nos "alter-mondialistes" eux-mêmes n'osent pas la revendiquer officiellement. Cette lubie a donné naissance dès 1919 à l'Organisation internationale du travail, et au Bureau du même objet, siégeant à Genève.

C'est aussi en Suisse qu'est apparue l'une des théories les plus putrides du laïcisme oppresseur : il s'agit de la doctrine appelée savamment "érastianisme" du nom d'Erastus alias Thomas Lieber, théoricien et même théologien suisse protestant du XVIe siècle (1523-1593) suggérant de soumettre entièrement l'Église à l'État, et qui trouvera ses premiers et principaux disciples en Angleterre.

Que notre charmante voisine la Suisse, ceci sans même parler de la Grande Bretagne, ait pu donner naissance à deux opinions aussi fâcheusement étatistes, voila qui devrait donner de l'espoir à tous ceux qui désespèrent de voir la France redevenir, au plutôt devenir enfin, ce qu'elle avait prétendu être dans le passé. Cessons de l'imaginer comme "le" pays — "we are the champions"— des Droits de l'Homme (1). Souhaitons qu'au moins l'on cesse d'y craindre, à chaque instant, le terrorisme fiscal, l'expropriation étatique et "sociale", l'arbitraire douanier, le monopolisme agressif, le chantage des bureaucraties syndicales, et la dictature constante du politiquement correct.

Pendant quelques jours je ne vous importunerai donc pas avec mes réflexions et j'espère retrouver un débat un peu enrichi, par des faits et des interventions mieux articulées que celles de ces derniers temps.

2. Espoirs...

J'avoue en effet que je trouve fort pauvre ce débat hexagonal dans lequel nos opinions sont constamment exclues et, pire encore, caricaturées.

Nous en avons un nouvel exemple avec l'échange d'idées entre le principal représentant du principal parti politique français, l'UMP et le ministre chouchou du chef de l'État M. de Villepin, à propos de l'immigration.

Certains jugent extraordinaire que le président de l'UMP, dans son intervention du 13 janvier, ait simplement osé poser des questions relatives à la définition de la politique d'immigration.

Voici dans son intégralité le passage incriminé :

"J’ai été frappé par l’importance que revêt dans les préoccupations des Français la question de l’immigration. L’UMP doit réfléchir, proposer et innover.

"Comment se fait-il que, dans certains pays, l’immigration est un facteur de dynamisme alors que, dans le nôtre, elle entretient les peurs les plus fortes ? En vérité nous nous trouvons dans cette situation où nous subissons une immigration incontrôlable parce que nous refusons de revendiquer une immigration qui serait voulue et assumée. De grandes démocraties ouvrent largement les portes de leurs universités aux étudiants étrangers qui deviennent les meilleurs de leurs étudiants avant de devenir des « nationaux » parfaitement intégrés. À l’inverse, nous n’avons pas assez d’étudiants étrangers, ce qui finira par poser un grave problème pour la diffusion de notre culture et la promotion de notre langue, et nous avons trop de « sans-papiers » qui se trouvent condamnés à vivre dans l’exclusion et la pauvreté la plus absolue. Ainsi nous accumulons tous les problèmes sans bénéficier d’aucun des avantages.

"Notre système d’intégration est en panne. Notre politique de l’immigration doit être repensée, redéfinie, profondément renouvelée. Nous ferons des propositions en ce sens. D’ores et déjà, il nous faut réfléchir à la désignation d’un ministère qui soit véritablement en charge de la problématique de l’immigration et de l’intégration au lieu d’avoir comme aujourd’hui trois administrations : celles des Affaires Étrangères, de l’Intérieur et des Affaires Sociales, en charge des mêmes questions avec des logiques contradictoires. La question des quotas devra également faire l’objet de débats approfondis, sans tabou et sans exclusive."

Personnellement je trouve un tel texte très en deçà de ce que ressent un nombre non négligeable de Français, et pas seulement les électeurs effectifs et actuels du front national.

De plus cela ne fait guère novation avec ce que le même M. Sarkozy écrivait, ou signait, dans un livre datant de 2001, intitulé Libre (2) et où l'on pouvait lire déjà

qu'entre "le laxisme inconséquent et l'obsession de l'étranger, il y a place pour une politique volontaire de l'immigration fondée sur des professions ou des pays". L'auteur s'y demandait s'il n'était "pas temps d'en finir avec cette hypocrisie qui nous a longtemps fait refuser les quotas", car selon lui, de tels quotas serviraient à "éviter la constitution de véritables ghettos, dus à une population non maîtrisée".

C'est bien du signataire de ces lignes que l'UMP a fait son président.

Mais, honnêtement, ce programme ne casse pas trois pattes à un canard.

Certes, cela semble encore trop de "volontarisme" à M. de Villepin, et au clan chiraquien dont il est le porte-parole. Ce clan s'en tient à ce qu'il considère comme "la tradition républicaine", c'est-à-dire au statu quo.

S'il s'agit de la condition juridique des Étrangers, on est quand même en droit de demander à quelles républiques, et donc à quelle tradition, pensent exactement M. de Villepin et son maître Chirac ? Probablement pas à celle de 1792, pas à celle de 1875, ni même à celle de 1946, qui avaient toutes la prétention de contrôler rigoureusement, et même durement, ce qui n'était même pas des flux migratoires.

Pour dire le vrai, et le dire jusqu'au bout, ce débat sur les quotas nous semble finalement assez misérable et hors du temps.

Dans la conjoncture actuelle le seul quota raisonnable serait un pourcentage certes indifférent puisqu'appliqué au multiplicande zéro, tant que la France n'aura pas absorbé les flux migratoires incontrôlés des 30 dernières années, et tant qu'elle n'aura pas appliqué des lois en cours d'élaboration au niveau de l'Europe.

Plus généralement, on doit bien mesurer que la définition de tels quotas serait un remède pire que le mal.

Quel homme politique oserait remettre en cause l'héritage des quotas post-coloniaux de fait ?

Quel homme politique français aura le courage de dire à nos compatriotes, et à nos "jeunes" que le traité signé à Amsterdam en 1997 interdit dans la pratique une telle politique "nationale" de l'immigration, puisque, de fait, tout ressortissant de nos anciennes colonies entrant en France, pénètre en Europe ? Il y a donc une bonne dose de mensonge et d'hypocrisie, en même temps qu'un fort relent de planification bidon dans ce programme de quotas qui ne verront pas le jour.

La pauvreté d'un tel débat est plus désolante encore que la situation à laquelle elle prétend remédier.

La tristesse de ces planifications populationnistes est aussi désolante que le résultat des 60 ou 70 dernières années de dirigisme, de paupérisme, de fiscalisme et de capitulations diverses devant les vraies causes du déclin de ce pays.
J'espère donc bien dans mes bagages du retour pouvoir faire le plein de bonnes nouvelles et je ne manquerai pas de vous en faire part dans un bulletin qui sera daté du 27 janvier..
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JG Malliarakis

©L'Insolent

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Apostilles

(1) Si ces droits sont ceux de l'Homme en général, il existe environ 190 patries des Droits de l'Homme, dont plusieurs ont précédé la France dans la définition des droits et surtout dans leur application…

(2) chez Laffont-Fixot.

(3) N'insistons pas quant à la prétention littéralement grotesque d'invoquer, en faveur des quotas, la législation américaine. À l'origine, en effet, les quotas américains étaient destinés, en toute candeur, à favoriser l'immigration préférentielle sur le sol américain des Nordiques (protestants et... "grands dolichocéphales blonds") ; les quotas, très stricts, étaient supposés renforcer la composition typique du peuple américain, en application des théories racistes de Vacher de Lapouge. Même les Irlandais, (catholiques... et "brachycéphales") étaient suspects… Les Américains n'aiment pas beaucoup qu'on le leur rappelle, mais les faits sont les faits. En 1924, une étrange coalition, dans laquelle le groupe Rockfeller figurait en bonne place, a permis l'adoption du "Johnson Act". Le propos était de limiter l'immigration aux USA d'hommes et de femmes venus d'Europe de l'Est ou du Bassin Méditerranéen, considérés comme pouvant potentiellement polluer "the pure American bloodstream" ! D'ailleurs, étudiés honnêtement et objectivement, 80 ans plus tard, les résultats de cette politique indiscutablement raciste démontrent son absurdité, quand on regarde ce qui s'est réellement passé avec le temps. Encore l'ironie de l'Histoire !

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