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BULLETIN EN TOUTE LIBERTÉ

LUNDI 14 MARS 2005

UNE FRANCE VIVANTE EXISTE, LOIN DE PARIS...

La Vendée un exemple pour l'ensemble des régions de France !

Ne soyons pas systématiquement grincheux ou aigris. Certaines choses s'améliorent. Même à Paris. Par exemple la correspondance du métro à Saint-Lazare était il y a quelque 10 ans un véritable attentat aux Droits de l'Homme. Eh bien, lentement mais sûrement, coûteusement sans aucun doute, les travaux avancent. La crasse recule. Et dans quelques années, on pourra (presque) commodément l'emprunter pour passer de Levallois Galliéni (ligne 3) à La Chapelle Marie d'Issy (ligne 13).

Alors, "elle est pas belle la vie" ?

Tout cela est une question de patience, m'assure-t-on.

Il n'est, cependant, de si bonne ambiance qu'on ne puisse la compromettre. "Le bonheur dans 20 ans" ou "dans 30 ans" c'était le programme de l'Union soviétique et, en 70 années, l'avenir radieux du communisme n'a cessé de se détériorer et de s'éloigner. En France, nous vivons dans un système à 40 % communiste (1). Un tel handicap pèse lourd dans la balance du chômage si élevé dont, "inexplicablement" la France et l'Allemagne sont pénalisées. Il bouche notre avenir.

Donc, je tiens à la dire, je demeure globalement pessimiste.

Il est cependant agréable de pouvoir citer un exemple de réussite, éventuellement opposable à la morosité ambiante : celui de la Vendée. Il vient d'être remarquablement mis en lumière par Pauline Lecomte dans son livre "Le Paradoxe vendéen" (2).

Bien mieux que je ne pourrais le faire, le livre lui-même, au travers d'entretiens avec 27 personnalités vendéennes fort diverses, nous montre une identité vivante et enracinée, nullement paradoxale (c'est le seul reproche que l'on peut faire à ce livre : son titre…). Ceci se traduit à la fois par une forte expansion d'industries jeunes (et "non polluantes") et par quelques brillantes réussites. Celles-ci découlent toutes d'une économie à base familiale et artisanale, d'un financement de proximité hors des lourds circuits institutionnels, etc. Cela donne du reste à réfléchir sur la "région", purement théorique et souvent factice, organisée par la Ve république en véritable inutile et dispendieux "machin".

En parallèle on soulignera une forte éclosion culturelle et identitaire dont le phénomène "Puy du Fou" est une des composantes, non la seule, et, pour le moins, un signe. L'auteur montre ici un Philippe de Villiers inattendu, bien plus crédible, pour tout dire, dans son contexte vendéen, où il est reconnu indépendamment de toute idéologie, de toute politique.

On lira aussi avec émotion le chapitre consacré à la lutte des Vendéens contre les (véritables) méfaits de certains pesticides. Bien évidemment, comme d'ailleurs pour la marée noire, pour la forêt, etc. l'État central parisien, si prompt à adopter la ridicule Charte de l'environnement, ne fait rien pour défendre la terre de France, les abeilles, le littoral, le paysage, etc.

Or la Vendée, riche de ses hommes, et de leur énergie, ne détient aucune ressource matérielle ou minérale significative. Elle est en cela un petit Japon. Au XVIIe siècle Richelieu tenait l'évêché de Luçon dont il fut le titulaire, pour "le plus crotté de France".

En 1945 encore, terre enclavée, très rurale, très artisanale, etc. la Vendée semblait vouée à demeurer une sorte de département sous-développé et, pour tout dire, pour conforter l'idéologie dominante, définitivement "arriéré".

Le "paradoxe vendéen" nous montre, au contraire son essor, particulièrement depuis les années 1970. C'est à nos yeux parfaitement logique, mais cela demeure absolument incompréhensible selon les critères dominants actuels du fiscalisme, de l'égalitarisme et de la redistribution.

L'explication de l'essor vendéen ce ne sont ni les flux migratoires, ni les transferts financiers, ni les macrodécisions technocratiques, ni les appuis politiques, c'est peut-être même, d'abord, l'absence de subventions et de prêts artificiels. Tout cela est inexistant en Vendée. On pourrait évoquer au contraire d'autres facteurs "paradoxalement" positifs en faveur du développement vendéen, comme l'habitat rural, la modestie du tissu urbain, l'autofinancement artisanal et aussi la très vive concurrence scolaire (50 % d'enseignement privé contre 16 % de moyenne nationale).

Ceci tend à exprimer le sentiment d'un scénario alternatif "optimiste", largement conforme à nos intuitions permanentes.

La France, les Français, les régions de France pourraient toutes s'en sortir selon le schéma de la Vendée, comme celui de l'Irlande en Europe depuis 20 ans, à condition de ne plus subir l'écrasant tribut centraliste jacobin, à condition de se prendre en main. Signalons d'ailleurs que d'autres exemples pourraient être cités : ils sont moins remarquables cependant.

Est-ce à nier ici la perspective nationale française dans l'Europe de demain ? Certainement pas. Malgré tout le mal, terrible, jamais réparé, que le jacobinisme leur a infligé (3), malgré l'indifférence que leur inspire la municipalité de M. Delanoé, les Vendéens restent français. Ils n'ont jamais été tentés par les voix de la sécession.

Ils nous semblent même, pour tout dire, représenter une sorte d'avant-garde. On se prend à rêver d'une France fédérant 45 ou 50 régions vivantes (4), enracinées dans leur histoire et tournées vers un avenir moins déprimant, moins "un et indivisible" peut-être, mieux adapté à la compétition mondiale, moins médiocre assurément.

JG Malliarakis
©L'Insolent

(1) On pourrait calculer ainsi le taux de communisme : soit "P" le taux effectif des prélèvements obligatoires et de dépenses publiques (en France 56 % environ), soit 16 le taux incompressible approximatif des dépenses liées à l'existence d'un gouvernement ou d'une autorité publique quelle qu'elle soit, le taux de communisme "C" (cette lettre pouvant recouvrir d'ailleurs un autre concept, "C" comme énarchie, "C" comme chiraquisme, "C" comme sécurité sociale, etc.) est de l'ordre de P - 16. Aujourd'hui le taux de la France est donc environ de 40. Celui de l'Union soviétique finissante, compte tenu de l'importante économie souterraine, devait être de l'ordre de 60. Sachant que le taux P progresse en France de 1 point par an, on peut espérer sinon le bonheur du moins Eltsine dans 20 ans. Calcul rustique, certes. J'attends les objections pertinentes et les améliorations de ce "modèle", un peu économétrique je le concède, de la part des lecteurs de l'Insolent.

(2) Publié chez Albin Michel en octobre 2004, 183 pages, 15 euros.

(3) Faut-il rappeler ici le rapport autosatisfait du général François-Joseph Westermann, écrivant à la Convention, au lendemain de la Virée de Galerne de décembre 1793 : "Il n'y a plus de Vendée, elle est morte sous notre sabre libre, avec ses femmes et ses enfants Je viens de l'enterrer dans les marais et les bois de Savenay. Suivant les ordres que vous m'avez donnés, j'ai écrasé les enfants sous les pieds des chevaux, massacré les femmes qui au moins pour celles-là n'enfanteront plus de brigands. Je n'ai pas de prisonnier à me reprocher, j'ai tout exterminé. [...] Nous ne faisons plus de prisonnier, il faudrait leur donner le pain de la liberté, et la pitié n'est pas révolutionnaire." Faut-il rappeler que le nom de Turreau continue encore aujourd'hui de souiller l'Arc de Triomphe de l'Étoile ?

(4) Brièvement : Il faudra bien un jour supprimer en France un échelon de collectivités locales ; et cet échelon sera très probablement celui du Département. Par ailleurs, les actuelles "régions", sans âme, composées elles-mêmes de départements arbitrairement regroupés (du "Nord-Pas-de-Calais" au hideux sigle "Paca" en passant par l'invraisemblable "Centre"), ne correspondent pas à grand-chose, au moins pour la moitié d'entre elles. D'autre part, rien n'oblige à assimiler les régions françaises aux Länder allemands, (eux-mêmes largement artificiels). Un redécoupage raisonnable irait non vers "8 ou 10", mais vers "45 ou 50" régions titulaires d'appellations historiquement et culturellement parlantes. Ce redécoupage devra être obligatoirement effectué, enfin, selon le vœu des populations.

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