Revenir à la page d'accueilAccéder au Courrier précédent Utiliser le Moteur de recherche Accéder à nos archives
Accédez au nouveau site de l'
Logo de l'Insolent

BULLETIN EN TOUTE LIBERTÉ

MARDI 3  janvier 2005

NOS PÈRES NOËL POLITIQUES NE CHANGERONT JAMAIS

Villepin recevanat les représentants de la viticulture

L'exemple de la viticulture devrait nous éclairer.

Au moment où ces lignes sont mises en ligne on commence à disserter dans la presse de nouvelles mesures de « réformes » inspirées par la doctrine de la TVA sociale. Son mérite essentiel aux yeux des démagogues serait, en apparence, de ne rien changer à la distribution des Pères Noëls, étendue cette année à la Fêtes des Rois en faveur des diverses catégories dépensières de cette redistribution appelée sécurité sociale.

Nous avons plusieurs fois souligné les dangers de cette théorie, et nous aurons probablement l'occasion d'y revenir quand commenceront à bourgeonner les prémisses printanières des propositions concrètes de mise en pratique.

En attendant il nous a été donné une fois de plus, lors du mois de décembre écoulé, de voir à l'œuvre les politiciens dans leur rôle de Pères Noëls. Ils se sont employés autour du reliquat de monde agricole ayant survécu à plusieurs décennies d'aides mortifères à « l'agriculture française ».

Pour être entièrement objectif on doit d'abord reconnaître certains mérites au texte de la Loi d'orientation agricole. Il a été déposé le 18 mai 2005 par le gouvernement, voté le 10 octobre sous le régime de la procédure d'urgence ; et, sans doute à ce titre, les deux assemblées en discutaient encore les derniers points de détail le 22 décembre.

Dans l'incroyable fouillis du travail d'enregistrement parlementaire (525 textes votés depuis 2002 par la XIIe législature de la Ve république), dans l'incompréhensible présentation bureaucratique de lois toujours supposées amender telle ou telle disposition d'une loi précédente, on peut dégager au moins une idée positive. Elle teint dans le titre du chapitre Ier : « Faire évoluer l'exploitation agricole vers l'entreprise agricole »

Oh, certes il en faudrait certainement plus pour répondre au mot d'ordre lancé par M. Dominique Bussereau, ministre de l'Agriculture : « Redonner à l'Agriculture des perspectives durables ». Ce discours était tenu le 10 mai devant le Conseil économique et social réuni en assemblée plénière et on se demande surtout si son rédacteur effectif, quelque vaseux communicateur au service des bureaux rédacteurs, s'est rendu compte à quel point il plagiait la rhétorique stalinienne des années 1930, quand le camarade Staline faisait mine de constater : « La vie est devenue plus facile, la vie est devenue plus gaie. »

L'Agriculture, en effet, demeure en France, le traîneau préféré des hommes de l'État désireux de se déguiser en Père Noël.
Sans doute, paradoxalement, cette démarche est-elle tout à fait cohérente du point de vue de la communication. Les exploitants agricoles ne sont plus que 500 000, leur nombre diminue tous les ans : ils sont donc de moins en moins nombreux à pouvoir témoigner que l'on ment aux Français.

Déjà en 1794, Saint-Just le prophétisait : « Il n'y aura de repos dans l'État que quand ceux qui le troublent seront morts ».

Asymptotiquement, le nombre des paysans de France tendant vers zéro, les émeutes agricoles seront de moins en moins à redouter. C'est cependant à l'une d'entre elles, orchestrée par l'inoxydable, démagogique et toujours provocateur Comité d'action viticole que l'on a cherché à répondre.

À l'heure du crépuscule de la carrière d'un président, dont 1 Français sur 3 souhaiterait la démission immédiate, on sent un frémissement des démarches d'ambitieux et mégalomanes imitateurs caressant, comme le ci-devant ambassadeur de Corrèze l'avait fait dans toute sa démarche ascensionnelle, le « lobby agricole ».

Passons sur le Conseil européen des 16 et 17 décembre, où la France s'est encore acharnée à défendre la « PAC » (1). À trois jours de distance, c'est le secteur « viticole » qui retient l'attention du grotesque locataire de l'hotel Matignon le lundi 20 décembre et celle de Modeste Ier empereur de Septimanie, le non moins grotesque Frêche faisant une place de choix au Comité d'action en son Hotel de région à Montpellier le 23…

À la place des viticulteurs réels, nous estimerions que la présente de telles fées carabosse près du berceau de la profession a de quoi inquiéter.

Résumons les épisodes précédents.

D'abord les producteurs de vins français souffrent de deux carcans corporatistes paralysant leur liberté d'entreprendre : car si l'on prétend passer de « l'exploitation » à l'entreprise agricole, la liberté devient fondamentale.

Pas d'entreprise véritable sans liberté d'entreprendre .

Or, 1° L'entreprise viticole est tributaire d'une réglementation agricole conçue pour 25 métiers totalement hétérogènes par rapport à la culture de la vigne, à la production et à la commercialisation du vin.

2° Les entreprises viticoles, si différentes elles-mêmes, selon les régions se trouvent enserrées dans une réglementation commune de caractère ubuesque.

Il ne faut pas croire que l'État a beaucoup varié face aux difficultés de la viticulture. On se souviendra par exemple qu'en 1907 Clémenceau, ministre de l'Intérieur, s'était déjà trouvé confronté la crise viticole du Midi et que, déjà, par « crise viticole » on se cantonnait à considérer la révolte mécanique des « cultivateurs de la vigne » confrontés à une concurrence de vins de basse qualité.

Dans le terroir languedocien, la seule vraie réponse durable à cette crise centenaire s'appelle l'amélioration de la qualité du produit. Encore partielle, elle a été le fait de quelques producteurs courageux et intelligents : cela ne doit rien aux hommes de l'État, encore moins aux lobbies du productivisme agricole.

Aujourd'hui l'étatisme prétend toujours répondre à cette crise d'il y a bientôt 100 ans, avec des modes de raisonnements productivistes, ou malthusiens, collectivistes et « sociaux » remontant à plus de 60 ans, à l'Office du vin du Front populaire, à la corporation agricole du maréchal Pétain ou au statut du fermage de la Libération – alors que tout a changé.
Glissons sur le fait que les politiciens sont bien bons de prétendre exercer leur sollicitude envers une profession traditionnellement exportatrice mais que l'État pénalise sans discernement sur le marché intérieur sous prétexte de lutte contre l'alcoolisme, lutte légitime dans son principe quand on mesure les ravages de celui-ci sur les faces de certains politiciens ou syndicalistes « rouges ».

Les vraies questions des véritables métiers actuels du vin sont aujourd'hui par exemple :

- celles du droit des marques (introduit dans la législation française, et dans l'intérêt des entreprises agricoles sous la pression de l'Europe) ;
- celles de la concurrence face à une production internationale croissante de qualité ;
- celle d'un financement qui ne peut plus reposer sur les prêts bonifiés du Crédit Agricole ;
- celles du droit de propriété de plus en plus bafoué par les réseaux « syndicaux » du pouvoir agricole ;
- celles de relations contractuelles du travail incompatibles avec la réglementation délirante de l'Hexagone. Le « Social agricole », pourchassant le travail saisonnier, est le premier ennemi de l'entreprise viticole, etc.

À aucune de ces questions la classe politique française n'est en mesure d'apporter une réponse ni même désireuse de le faire.

Une fois établi l'inventaire des hottes de décembre 2005, on constate que les Pères Noëls politiques français n'ont apportés que des jouets de deux sortes : les uns étaient factices, les autres sont volés.

JG Malliarakis
©L'Insolent

(1) Nous avons évoqué cette nuisance dans notre bulletin du 21 décembre : n'y revenons pas.

• ...Pour commander le livre Sociologie du communisme ... • ...Pour accéder au catalogue des Éditions du Trident
Revenir à la page d'accueil Utiliser le Moteur de recherche Accéder à nos archives
• Vous pouvez aider l'Insolent ! : en faisant connaître notre site à vos amis • en souscrivant un abonnement payant