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BULLETIN EN TOUTE LIBERTÉ
VENDREDI 13 janvier 2006
bobos, gogos et cocos
Ces jours-ci, à l’usage des gogos, les commentateurs agréés glosent sans retenue sur ce programme de retour à l’équilibre et de réfraction optique de la dette française à l’horizon de 2010 annoncé par les autorités publiques. De tels scénarios comptables laissent rêveurs, situés à pareille échéance, et on se demande vraiment combien de Français peuvent encore les prendre au sérieux.
La fragilité des échafaudages stratégiques de nos maîtres devient en effet chaque jour plus éclatante.
On nous épate de calculs en chambre et on perd de vue l’existence souterraine d’une vie sociale échappant de plus en plus au contrôle des États et des administrations. On multiplie les radars pour quadriller, ficher, réprimander les automobilistes en règle mais on laisse de côté le million, chiffre évaluatif, de personnes circulant tranquillement avec de faux permis de conduire, etc…
Dans l’ordre politique, celui qu’on nous présente pour le plus important sinon le plus sérieux, il est beaucoup calculé sur qui, de « plic » ou de « ploc » sera le porte-parole d’une force dont sauf erreur le suffrage universel n’a guère crédité le tenant du titre que de moins de 20 % des votants au 1er tour de 2002. Or, au sein de la droite ce candidat éventuel aura à se partager 55 % des voix avec 3 autres candidats sérieux actuellement déclarés, allant de M. Le Pen à M. Bayrou plus, sans doute, M. Philippe de Villiers.
En face, à gauche, un curieux phénomène paraît, bien au contraire, pouvoir se dessiner :
- d'une part celui de la gauche modérée qui a, en Ségolène Royal, une candidate (techniquement, facialement) tout à fait remarquable, réunissant toutes les options pour capitaliser les voix des « bobos »
- et celui de toute la gauche contestataire, allant des « cocos » vieille garde aux « cocos » camouflés, M. José Bové lui aussi parfaite figure emblématique de rassemblement (1).Dans le camp des « gogos » la division s’installe.
Dans celui des « bobos » et des « cocos » les tendances au rassemblement sont en train de l’emporter sur les tiraillements traditionnels et les ambitions caricaturales autour des éternels « candidats à la candidature », M. Fabius officiel depuis le 11 janvier, M. Chevènement au moral inchangé depuis son exploit de 2002.
En observant ces tendances jetables, on doit être tout à fait conscient que les choses tiennent à un fil, que les jeux les plus intelligents sont toujours perturbés par l’imprévision accidentelle de l’histoire.
Le grain de sable de Cromwell n’est pas une spécialité oubliée du XVIIe siècle et de l’Europe baroque.
Quelques centaines de voix en Floride ont changé le monde pour plusieurs années.
Quelques phrases malheureuses autour d’une tragédie à Madrid ont empêché la réélection triomphale et « inéluctable » de la droite espagnole, après des années de réussite gouvernementale.
Quelques grammes de cholestérol (2) sont en train de redistribuer les cartes, 5 ans après une promenade à Jérusalem un jour de septembre 2000 entreprise par le général Sharon, etc…
N’oublions donc jamais la fragilité de toutes nos hypothèses… mais… si je divise 55 % chez les gogos par 4, j’obtiens une moyenne de 14 % des voix par candidats… si je divise 45 % chez les bobos et les cocos par 2 j’obtiens une moyenne de 22 % Cela fait donc que le second de la gauche passerait cette fois devant le premier de la droite…
Cela ferait un joli second tour Ségolène Royal contre José Bové.
Un nouveau tremblement de terre.
Cela constituerait, accessoirement, une nouvelle claque – bien méritée penseront certains – pour les institutions de la Ve république.
Vous allez me dire, bien entendu, que les choses sont beaucoup plus compliquées. Ah ! bien sûr on peut toujours les rendre plus opaques, plus incompréhensibles.
Mais puisqu’on fête le 10e anniversaire de la mort de Mitterrand, a-t-on oublié sa recette toute simple : unir la gauche, diviser la droite. C’est ce qu’il a fait avec un talent systématique à partir de 1965 – et c’était, apparemment, un tour de force. Souvenons-nous par exemple que les socalistes français à partir du martyre de Budapest en 1956 refusaient toute alliance avec les communistes, et qu’aux élections législatives de l'automne 1958, le parti communiste, balayé, discrédité avait obtenu à peine 10 députés ?
Histoire ancienne direz-vous ?
Eh bien une autre histoire plus ancienne encore est en train de se reconstruire : qui eût imaginé naguère la réconciliation des trotskistes et des héritiers du communisme stalinien ? Aujourd’hui Mme Buffet insiste, avec le soutien des Verts, pour que la LCR de Krivine (3) soit invitée aux réunions d’union de la gauche — alors que la LCR annonce d'emblée qu’elle n’y assistera pas.
En même temps Bové (4) apparaît en effet comme le trait d’union entre Parti communiste, LCR et Verts — Attac, la Fsu et la CGT. Additionnez les voix de ces 3 partis en 2002 et dites-moi ce que cela fait, avec en plus le saupoudrage des « nouveaux électeurs » du 9-3.
Ce qui doit nous préoccuper dans ce scénario ce n’est pas tant une hypothèse, — cette hypothèse-là au milieu d’autres, — mais bien l’absence de programme, l’absence de convictions, l’absence de stratégie du camp des éternels « gogos » à la recherche d’un homme providentiel, d’un hypothétique « sauveur » : Juppé n’est toujours pas vraiment présentable ; on se ralliera donc au second tour sur n’importe quoi. On votera royalement pour Royal. Certains voteront même pour Bové, en y voyant peut-être un défenseur de « l’identité ».
Ce que je trouve affligeant, dans un pays où la véritable majorité est à droite, toujours réticente au fond à tout bouleversement des propriétés et des libertés, c'est que l’idéologie liberticide soit artificiellement dominante, monopoliste et inquisitrice, dans les médiats, dans les institutions, dans les facultés, dans les tribunaux, dans les écoles, dans les sociétés de pensée.
C'est par la complaisance des gogos, que l'idéologie des bobos et des cocos, produit d’une intoxication continue du syndicat des médiocres, s'impose sans concurrence comme référence constante du pouvoir culturel.
Nous disposons certes de moyens pour contourner cette obscène dictature du politiquement correct.
Nous disposons d’abord d’arguments…
Nous disposons ensuite d’armes de terrain, des armes de petits, de faibles, de pauvres, de marginaux, c’est vrai. Mais précisément c’est avec de telles armes que l’on peut gagner contre ces grosses structures impotentes dirigées par des aveugles et des sourds.
Il suffirait, pourtant, de si peu de chose.
Il suffirait d’ouvrir les yeux, et peut-être aussi d’ouvrir nos cœurs, en ayant une pensée non pas seulement, toujours, pour nos conforts individuels, mais pour ce qui s'appelle tout simplement les malheurs de la patrie – il suffirait aussi de consentir certains petits sacrifices pour la cause de sa liberté.
JG Malliarakis
©L'Insolent(1) cf. dans Le Monde daté du 11 janvier : « Bové prêt à être le candidat unique à gauche du PS ».
(2) Ou autre cause médicale mystérieuse.
(3) Krivine est apparu lui-même en 1965 pour avoir refusé le soutien du PCF, — auquel il était affilié au sein de l'Union des étudiants — communistes du candidat Mitterrand. C'est à la suite de ce refus que fut officiellement créée la Ligue communiste qui ne devint nominalement révolutionnaire (ce qu'elle se voulait, évidemment, dès le départ) que pour reconstituer ladite ligue dissoute après mai 1968.
(4) Dont nous avons commencé, dans ce bulletin, à souligner le rôle depuis 1999.
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