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BULLETIN EN TOUTE LIBERTÉ

MARDI 14 FÉVRIER 2006

ILLUSIONS DANS LA RÉGLEMENTATION DE L'IMMIGRATION

BretonManif des sans papiers

Le slogan électoraliste de l'immigration « choisie » ne résistera pas à l'épreuve des faits.

Le 9 février dernier, en l'hôtel Matignon, se tenait un Conseil interministériel sur l'Immigration. Il réunissait une dizaine de membres du gouvernement Villepin. À la sortie de ce brillant échange de vues, c'est M. Thierry Breton, ministre de l'Économie et des Finances, auquel il fut échu de communiquer.

Sa rhétorique était parfaitement huilée.

Première partie du discours : en gros l'immigration est, toujours, une chance pour la France. Pensez : « une étude de la Direction du Trésor », ayant observé les dents et les muscles de la cargaison d'élèves, évalue de la sorte son apport à la prospérité nationale :
« Le rapport évalue que l'arrivée de 50 000 immigrés se traduit en moyenne par un accroissement de la richesse produite dans notre pays de 0,1 % ».

À vrai dire, des modèles arithmétiques comme celui-là, je me sens capable d'en produire, pour pas cher, tous les matins : ce calcul moyen revient à estimer qu'une augmentation de 0,1 % environ de la population « se traduit » grossièrement par une progression en moyenne équivalente du produit intérieur brut.

En raisonnant de la sorte, la France comptant actuellement 60 millions d'habitants, l'arrivée de 180 millions de Chinois multiplierait par 4 la puissance de notre pays. On essaye ?

Ne doutons pas que la Direction du Trésor envisagerait quelques objections du genre : la circulation des automobiles se multiplierait « environ » par 4, la pollution aussi. Sans parler des 14 milliards de sacs en plastique jetés chaque année : ils risqueraient de passer à 56 milliards. Il faudrait peut-être multiplier par 4 le nombre de poules pondeuses et de vaches laitières (attention : les Chinois consomment peu de lait) et d'autres remarques anecdotiques de ce genre.

Deuxième partie de l'exposé : cette immigration sera d'autant plus profitable, nous dit-on, qu'elle sera « choisie ».

Car, colossale finesse, si on « choisit » les immigrés, essentiellement en âge de travailler, — et désireux de le faire, — on peut gagner, nous dit-on, 25 % d'efficacité.

Impeccable, n'est-ce pas ? On part d'un discours politiquement correct pour embrayer très rapidement sur une série de mesures un peu plus restrictives. Les grands habiles admireront l'astuce.

Et qui va « choisir » ? Pardi, la Direction du Trésor à laquelle la grandeur française doit MM. Trichet, Habérer et quelques autres bienfaiteurs de l'économie.

Évidemment, les gens de la Direction du Trésor, qui savent tout, ont ainsi évalué que la France a besoin « de sages-femmes, de charcutiers, de cadres du bâtiment et de personnes qualifiées ».

Je n'invente rien ! J'ai lu Le Figaro ! Je me plais seulement à imaginer les charters de sages-femmes importées directement du Honduras ou du Vanuatu. Car, sur 190 pays dans le monde, il en est nécessairement qui rêvent de nous refiler leurs excédents de sages-femmes. De même, comme le monde est bien fait, l'Ouzbékistan va nous envoyer, pour plaire à la Direction du Trésor, des cars entiers de charcutiers. Et si, par bonheur, les « besoins » en charcutiers sont un multiple de 55 et ils pourront ainsi venir en cars climatisés depuis Samarcande, puisque cette ancienne capitale tadjik a été incorporée à l'Ouzbékistan par Joseph Vissarianovitch Staline.

Les beautés de la planification new-look ne nous échappent pas.

Qui sait cependant si le père du ministre de l'Intérieur en sa qualité de publicitaire serait venu en France à un moment où la Direction du Trésor n'aurait pas estimé nécessaire de faire venir des publicitaires hongrois. Quant au mien, venu à Montparnasse dans les années 1920, sans étude de marché préalable, sans savoir si la France avait besoin d'artistes peintres, il avait par avance tourné la réglementation future, en passant par des études d'architecte.

Ceci pour dire à M. Breton, qu'il devra se méfier particulièrement des Grecs. Et d'ailleurs il devrait avoir l'œil sur tous ces étrangers pas très catholiques. Ainsi, à l'époque, beaucoup de Russes blancs ont profité des besoins en chauffeurs de taxis (faut-il dire merci à la révolution bolchevique ?) mais ils furent plus nombreux encore à venir « manger le pain des ouvriers » du Creusot, d'Ugine et d'autres centres industriels.

N'en doutons pas, depuis « Piatiletka » stalinienne de 1932, la programmation de Bercy, assistée par ordinateurs a fait beaucoup de progrès. Déjà, l'aviation civile américaine depuis 2001 a renoncé aux annonces du type : « Cherchons élèves pilotes saoudiens spécialistes du décollage, atterrissage inutile. ». En France nous décernons encore des visas de tourisme à des gens munis de billets aller simple : allez savoir pourquoi.

Cet habillage hypocrite, cette planification ridicule vise aussi à pomper les élites du Tiers-monde. On continuera à priver le Cameroun de docteurs en médecine que nous utilisons comme soignants de seconde zone dans nos hôpitaux.
Et tout cela passe à côté du véritable problème civique, lequel peut s'exprimer en termes de ras-le-bol de la nation, autant qu'en trop-plein de la société.

Ayons l'honnêteté de reconnaître que planifier, réglementer, recalculer ainsi l'immigration n'a strictement aucun sens. Dommage n'est-ce pas ?

Puisque les pouvoirs publics ont la prétention de démontrer auprès de l'électorat une attitude ferme, le seul calcul crédible, dans la phase actuelle, serait celui qui se traduirait, par un résultat zéro immigration extra-communautaire, zéro visa de tourisme douteux, zéro naturalisation systématique, zéro subventions, assistanats et autres pompes aspirantes. Et par ailleurs, si on veut rassurer cet électorat, on ne le fera qu'en produisant un flux inversé tangible hors du sol métropolitain d'expulsions des contrevenants. Le reste est galanterie.

Si on observe en effet de plus près les « grands textes » qui ont prétendu, depuis 1945, encadrer légalement le séjour des Étrangers, on découvre en effet qu'ils ont abouti strictement au contraire des buts affichés. Ainsi, en 1974, on a prétendu « mettre fin » à l'immigration légale. Et on a ouvert une voie royale à l'immigration illégale régularisée et au « regroupement familial ».

Comme ni la Direction du Trésor ni M. Breton ne patrouilleront jamais dans l'Adriatique pour savoir combien la mafia albanaise transporte dans ses barques de sages-femmes pakistanaises et de charcutiers turcs, rien ne changera dans la pratique.

Certes il faut prendre note de l'intention affirmée de lutter contre les « fraudes au mariage binational », de « durcir les conditions » du regroupement familial. Le Figaro du 10 février applaudit même à l'idée qu'un étranger « ne pourra plus se prévaloir du montant des minima sociaux pour accueillir sa famille », etc.

Combien de Français peuvent-ils cependant entendre encore ce genre de rodomontades administratives et de demi-mesures sans
- ou bien hausser les épaules,
- ou bien éprouver une sorte de malaise devant la montée de cette technocratie répressive à buts électoralistes ?

Il serait intéressant de connaître sur ce point le sondage que serait capable de réaliser, sur ce point, la Direction du Trésor.

Toutes ces illusions étatistes ne trompent plus que ceux qui désirent être trompés.

L'immigration non voulue est essentiellement engendrée par les faux-droits socialistes. Tant qu'on n'en aura pas fini avec les faux droits, la régulation arbitraire de leur pénurie ne pourra devenir que de plus en plus stupide et de plus en plus écœurante.

JG Malliarakis
©L'Insolent
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