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BULLETIN EN TOUTE LIBERTÉ

VENDREDI 5 MAI 2006

LA POLITIQUE EXTÉRIEURE DU CAMP DES LIBERTÉS

Couverture du lIvre de Jules Monnerot

Paris est (re) devenu une base de repli pour les ennemis des libertés.

Sans le vouloir, presque par hasard, j’ai été désigné volontaire pour rédiger, dans un groupe de travail essentiellement attaché aux libertés économiques, quelques lignes de propositions relatives à la politique extérieure.
Spontanément, j’eusse plutôt préféré parler de sujets plus simples à première vue comme la lutte anti-fiscaliste.

Ma conviction en effet c’est que la politique étrangère, telle qu'on la pense encore à Paris, est la chose des grandes puissances. La France ne l’est plus, l'Europe ne l'est pas encore. Le concept même d’un Ministre des Affaires étrangères commun à l’Union européenne, concept contenu dans le projet de Traité constitutionnel, a été rejeté avec celui-ci par le référendum français du 29 mai 2005.

Ne nous dérobons pas cependant à la question qui nous est posée.

On doit l'envisager à la fois du point de vue de la patrie et de la liberté, les deux notions étant étroitement liées, intimement conditionnées l’une par l’autre. On doit savoir ce que nous pouvons dire des relations internationales.

La première chose à considérer c’est d’abord le déclin des conceptions géopolitiques du XIXe siècle et même la suspicion dans laquelle il faut tenir, désormais, les modes de raisonnement globalisants, l’axiome faux par lequel on identifie par exemple « la Chine », la civilisation chinoise et l’État central chinois. Un érudit sinisant que j’aime beaucoup disait ainsi : « Je ne connais pas la Chine ; je ne sais pas ce que c’est ; je connais seulement des Chinois qui rêvent la Chine »

Rêvons-nous la France ? Rêvons-nous l’Europe ?

Partons d’abord des réalités observables. Constatons par exemple qu’à l’heure de la mondialisation, le nombre des États souverains représentés à l’ONU s’est multiplié par 6 en 60 ans, bientôt 200 pays, tandis que l’Europe institutionnelle sera passée, en moins de 50 ans, de 6 États membres du marché commun en 1957 à 27 États membres de l’union européenne en 2007.

Nous sommes en présence d'un foisonnement, d'une extraordinaire diversité, impliquant diversification croissante des situations.

Celles-ci n’empêchent pas, d’ailleurs, la loi de Newton de s’appliquer du Pôle nord à l’Antarctique.

Dans les quelques pays qui prétendent encore refuser les lois de la pesanteur économique, les lois du marché libre, la misère progresse à grand pas : on n’arrêtera pas son progrès. Simultanément, un nombre considérable, et même la majorité des hommes de l’État s’emploient à ruser avec cette réalité, appauvrissement relativement des populations.

Notre première conclusion tendra ainsi à s'écarter résolument de la politique étrangère actuelle des gouvernements de Paris. Celle-ci a été définie en 1963, sur une base économique théorique fausse, par De Gaulle : « Le marché a du bon et encourage à se dépasser soi-même. Mais il fabrique des injustices, installe des monopoles, favorise les tricheurs. C'est l'État-Nation qui doit surplomber le marché. Si le marché régnait en maître, ce sont les Américains qui régneraient en maîtres. Tout ça n'est qu'un simple camouflage de l'hégémonie américaine. Si nous suivions le marché les yeux fermés, nous nous ferions coloniser par les Américains. »

Toute observation des relations dites internationales doit au contraire s’articuler autour de quelque chose comme ce dicton britannique : « [1°] on peut tout échanger [2°] avec des cannibales (car il y a des cannibales) [3°] excepté la viande. »

1° On peut tout échanger…

Autrement dit le commerce international, ou plus précisément les échanges transfrontaliers sont le ciment de la paix.

Ne nous leurrons pas sur la paix : elle ne résulte pas d’une capitulation systématique et lâche.

La paix c'est l'espace du temps, le plus durable possible, séparant deux guerres.

Observons également aujourd’hui que la politique extérieure de la France est de plus en plus dictée par la considération de ses minorités intérieures. C’est bien cela, aussi, qu’il s’agit de renverser.

Le libre-échange est l’arme principale de la paix alors que le protectionnisme d’État prépare et annonce la guerre, comme le nuage annonce l’orage : l’expression vient, on le sait, des auteurs marxistes à propos de l’impérialisme car ils voyaient celui-ci au travers du prisme de rivalités coloniales. Leur erreur a été de croire que le protectionnisme des États reflétait la logique intrinsèque du capitalisme (1). Ils le croient encore et plus que jamais.

Soulignons aussi que nous assistons dans un certain nombre de pays, dans certaines zones d’économie déclinante comme la France en particulier, à une remontée du protectionnisme des États appuyés sur les couches professionnelles les plus stagnantes, sur la haute fonction publique, sur les journalistes des médiats subventionnés, etc.…

Le débat sur la mondialisation est à cet égard parfaitement emblématique et probablement central. Les jacobins français, ou plutôt leurs héritiers dégénérés, voudraient à la fois nous faire ingurgiter une utopie « mondialiste », utopie tendant à nous faire croire à la possibilité d'un « pouvoir mondial » - et à nous faire rejeter la réalité relative de la mondialisation bienfaisante qui a accompagné toutes les grandes heures de la civilisation européenne.

À noter que l'Europe n'a pas le privilège de cette expérience : la plus haute expression de la civilisation chinoise c’est l’époque des Tang qui s’ouvre au monde extérieur, alors que les dernières dynasties Yuan, Ming et Qing enferment progressivement le monde chinois dans l’étatisme et la décadence. Nous ne sommes pas en présence d’un trait universaliste qui serait propre aux Européens, et qui est effectivement l'essence du christianisme, nous sommes dans le cas d’une loi d'application universelle.

Faut-il dès lors recouvrir d’une étiquette « libérale » ou « nationale », la volonté de sortir la France et l’Europe de leur fermeture décadentielle et protectionniste, c’est aux divers tempéraments idéologiques de se prononcer.

Pour avoir cependant édité, donc relu et corrigé typographiquement les « Scènes et doctrines du nationalisme » de Maurice Barrès je crois hélas pouvoir dire qu’il existe de ce point de vue un fort malentendu protectionniste dans les modes de pensée du nationalisme français. Le fameux programme de Nancy de 1899, « républicain, socialiste et nationaliste », rédigé par Barrès s’inscrit dans un courant conjoncturel qui apparaît en Europe avec le tarif extérieur protectionniste inventé par le républicain radical Méline en 1892. On sait en effet que la Prusse victorieuse imposa aux Français, au traité de Francfort de 1871, ce qu’on appelle « la clause de la nation la plus favorisée ». Cela fit de la France, pour son plus grand bénéfice, dans un premier temps, un espace commercial ouvert puisqu’elle avait déjà signé en 1860, sous l’influence libérale de Chevalier, et grâce aux campagnes conjointement et intelligemment menées des deux côtés de la Manche par Cobden et son ami Bastiat, un traité de libre-échange avec l’Angleterre. Il se trouve cependant qu’à partir du grand ministère Gambetta de 1882, où Méline reçoit le ministère de l’Agriculture, la grande question que se posent les républicains est d’arracher les campagnes aux catholiques et aux monarchistes.

Ils vont ainsi se servir de deux instruments essentiels : la fondation du Crédit agricole, qui sera très lent à se mettre en place et l’invention du protectionnisme.

Or, si le Crédit agricole à partir de 1892 n’a vraiment commencé à faire de dégâts à la finance et à la paysannerie françaises exclusivement que 15 ou 20 ans plus tard (au départ les exploitants agricoles ne voulaient pas et n’avaient pas besoin de s’endetter) la mise en place des barrières douanières s’est étendue par ricochet à toute l’Europe.

C’est par exemple contre le tarif protectionniste italien de 1896 que Pareto écrivit ses lumineuses chroniques libre-échangistes. Mais la surenchère qui en résultera est une des causes de la guerre de 1914, de même que la guerre de 1939 doit beaucoup à l’étouffement des échanges résultant de la crise, de la mise en place d’économies fermées dans l’Europe centrale, danubienne et balkanique, cependant que, un par un, les pays ruinés par la crise se trouveront aspirés par le système d’échanges polarisé sur l’Allemagne mis en place par le Dr Schacht (2).

Or, les nationalistes sont politiquement apparus en France dans ce contexte comme une sorte de dérive politique du courant socialiste, républicain, blanquiste puis boulangiste : ils en ont hérité le protectionnisme que Maurras, peu informé de l’économie, a repris. Et leurs héritiers sont aujourd'hui dans la même erreur.

2° Avec des cannibales : car il y a des cannibales.

On peut légitimement débattre sur la manière dont Huntington pense le Choc des civilisations. Notons par exemple que le livre date pour l’édition américaine de 1996. En 10 ans beaucoup de choses ont évolué : aussi bien la réalité de l’islamo-terrorisme que la Chine ou la Russie.

Y a-t-il d’ailleurs « des » civilisations ou « une », « la » civilisation… excellent débat.

Il y a en tout cas des barbaries : barbarie communiste en train de réapparaître au grand jour notamment en Amérique latine, barbarie de l’islamo-terrorisme, barbaries mafieuses des narco-traficants. Ces structures criminelles tendent même à la convergence.

Une politique extérieure qui tendrait à ignorer cette réalité, qui croirait encore au concert des États ne peut être que complaisante et complice. Elle insulte les libertés, elle abaisse la patrie : Il doit être clair que nous la récusons.

3° Excepté la viande…

Or précisément la politique extérieure de la France dans une tradition qui s’appelle le gaullisme, et en vertu d’une « belle et bonne alliance » scellée à Moscou en 1944 n’a pas cessé chaque fois que les gaullistes sont aux affaires de faire commerce de viande avec les cannibales.

On doit s’en préoccuper et le dire nettement.

On doit savoir aussi que nous sommes dans un processus de guerre dont l’enjeu est précisément la destruction de nos substances nationales.

Cette guerre de destruction avait pour protagoniste, il y a un demi-siècle, le communisme. Il est faux de croire que ses agents de destruction intérieure aient cessé d'être à l'œuvre en France et contre la France du jour où leur centre géographique de propagation aurait disparu en 1991. Au contraire, Paris est (re) devenu une base de repli.

Recevant ce soir à Radio Courtoisie l'auteur colombien d'un livre sur les FARC (4) j'observe hélas que l'Amérique latine est à nouveau en proie à la démagogie nationalisto-communiste, réamorcée par la dialectique délirante de l'indianisme, du Venezuela de Chavez à la Bolivie de Morales, on éprouve l'impression que la scène n'a fait que de changer de théâtre et de climat, la cordillère des Andes, la mer des Caraïbes et les réserves de gaz naturel et de pétrole relayant la Sibérie et les bords de la Caspienne.

Aujourd'hui les mêmes agents de destruction protègent, par ailleurs, la propagation de l'islamisme et la France est un de leur sanctuaire.

Nous sommes en plein dans un processus qui avait été décrit en son temps par Jules Monnerot, en particulier dans son livre intitulé La Guerre en question.

En 1949, Jules Monnerot, avait publié sa monumentale Sociologie du communisme. Il renversait complètement la machine intellectuelle sur laquelle reposait, et repose encore, la diffusion des utopies d'extrême gauche, ce qu'il appelait alors « Islam du XXe siècle ».

Au moment de la première édition de ce livre chez Gallimard, la réaction ne se fit certes pas attendre.

Un sourd mot d'ordre d'excommunication, une fatwa marxiste fut lancée contre son auteur afin « que son nom ne soit plus ».

Cependant les circonstances terribles, terribles pour l'Europe, dans lesquelles le livre avait été écrit, c'est-à-dire au moment du fameux « coup de Prague » de 1948, quand les Soviétiques avaient mis la main sur la Tchécoslovaquie, firent que diverses forces politiques se développèrent, auprès desquelles les travaux de Monnerot trouvèrent un écho (4) . Car C. De Gaulle était à la tête d'un parti dont la fortune électorale, 121 sièges aux élections législatives de 1951, reposait sur l'anticommunisme…

Mais la résistance au communisme s'arrêta très rapidement au sein de l'intelligentsia française, et ce fut un des effets pervers de la protection américaine et de son parapluie nucléaire.

Dans la période 1951-1953, non seulement au sein du parti gaulliste « le rassemblement devint une débandade » mais son chef revint à sa politique de 1944 ; et dès 1953 il formulait dans une de ses dernières réunions publiques son programme de politique extérieure d'ouverture à l'Est, laquelle demeure la grande idée inassouvie des Chirac et Villepin.

Deux après Sociologie du Communisme, ouvrage d'une haute qualité scientifique, Jules Monnerot publia dès lors un livre encore plus actuel et brûlant : « La Guerre en question » achevé d'imprimé le 20 septembre 1951.

Ce livre prophétique fut totalement mis sous le boisseau. Car il annonçait, ou plutôt il prenait acte, de ce que l'Occident n'a jamais voulu enregistrer comme une guerre d'un type nouveau : guerre non plus contre des nations mais contre des Empires idéologiques, c'est-à-dire en dernière analyse contre des idéologies. À une période où on préfère penser à une confrontation avec « les Russes », Monnerot montre la nature de religions séculières de l'empire de l'est. Il faudra attendre la présidence de Reagan pour que l'occident accepte d'y voir l'empire du Mal.

Cette guerre ayant été décidée par des idéologies, hier le communisme, aujourd'hui l'islamo-terrorisme, il n'y a donc pas lieu d'ergoter ou de tergiverser, encore moins d'ironiser : il y a lieu de comprendre la guerre que nous font les ennemis, et il y a lieu de les vaincre.

Cette conception nouvelle de la guerre fut progressivement mesurée sur le terrain par une partie de l'Armée française en Indochine et en Algérie.

On sait, malheureusement, combien les événements ont permis aux technocrates de la sécurité nucléaire, d'éliminer, avec l'appui du parti communiste, les éléments de résistance à la subversion qui avaient le malheur de poser l'indécente question : « Pourquoi pas la victoire ? » (5)

Dans la lutte entre la Liberté et la Barbarie, nous n'avons pas le choix. Nous ne pouvons pas être neutres. Il faut tout faire pour vaincre.

JG Malliarakis
©L'Insolent

(1) En ce sens ces auteurs et Lénine en tête dans son texte central de 1913 sur l’Orient avancé face à l’Europe retarder trahissent littéralement la pensée de Karl Marx, lequel souligne, et il approuve « dialectiquement » [c'est là toute la question du marxisme] dès le Manifeste de 1848 que « la bourgeoisie a créé le marché mondial ».
(2) voir à ce sujet ses Mémoires d’un Magicien. Paris 1954
(3) En annexe à la réédition (Tome III pages 267 à 269) nous publions ainsi une petite lettre d'approbation signée C. De Gaulle en date du 19 décembre 1949, 20 ans jour pour jour noterons les amoureux des éphémérides, avant l'attaque criminelle de Pierre Goldman contre deux malheureuses pharmaciennes.
(4) Eduardo Mackenzie "Les FARC ou l'échec d'un communisme de combat" (1925-2005) 592 pages Publibook 2006
(5) Question incongrue que le sénateur Goldwater posera à son tour en 1964 dans la campagne électorale américaine.

Un certain nombre d'exemplaires de la Guerre en question ont pu être sauvés. Nous proposons ici ces volumes à nos lecteurs.

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