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BULLETIN EN TOUTE LIBERTÉ
MERCREDI 11 OCTOBRE
LA DÉRIVE INSTITUTIONNELLE S'ACCÉLÈRE
Les partis actuels font de l'immobilisme leur doctrine, du déclin national leur programme et du fiscalisme leur pratique..
Les déclarations rivales au sein de l'UMP se multiplient. La majorité parlementaire, en même temps qu'elle se répartit les investitures en vue des législatives, s'affaire et se déchire, elle aussi, autour des ambitions présidentielles. Tout cela s'accomplit de manière terriblement prévisible, comme la chute de fruits mûrs, et leur pourrissement.
Ainsi Mme Alliot-Marie avance l'hypothèse de sa propre candidature, qu'elle déclare vouloir décider elle-même en janvier, et non en novembre. Ainsi M. de Villepin fait-il mine de la prendre en considération. Ainsi M. Sarkozy s'irrite, s'inquiète et s'agite. Ainsi M. Juppé fait, à l'avance figure de conciliateur, âme du parti dont il avait été le fondateur et le chef en 2002, avant d'être provisoirement mis sur un ban de touche par son procès, non moins provisoirement, infamant de 2004. Adoubé par un Bordelais sur quatre, Juppé peut se prévaloir aujourd'hui d'une plus grande popularité que Chirac soutenu au premier tour de 2002 par un électeur français sur six.
Tout cela, qui n'est guère nouveau dans les clapotis du marigot, n'est pas non plus de nature à nous bouleverser.À gauche, d'ailleurs même agitation, même fébrilité, même abyssale rivalité, autour des ambitions, des illusions, et soulignons-le, des divergences profondes en matière de politique intérieure, d'orientations économiques ou de relations tant avec l'Europe qu'avec les États-Unis.
Des deux camps on peut prédire qu'au printemps prochain ce sera le moins désuni et le moins déprimé qui l'emportera sur le moins tonique et le moins cohérent. Certains se demandent même dès maintenant si l'incohérence, la désunion et la déprime n'engendreront pas des effets encore plus ravageurs, ou plus surprenants, que ceux des scrutins précédents. Quand les éditorialistes peuvent écrire que, par exemple "la France s'ennuie" (1) on peut envisager beaucoup de choses.
Dans ces combats de nains, cependant, une autre chose se dessine : le lent et peut-être inexorable recul de l'esprit des institutions.
La procédure choisie par les dirigeants de l'UMP tend de plus en plus à faire désigner le candidat par un parti. Cela contrevient absolument aux principes adoptés par le gaullisme en 1958. Même le parti socialiste quand il fit sienne cette pratique, à partir du congrès d'Épinay de 1971, où il s'était lui-même reconstruit sur les débris de l'ancienne SFIO et de la défunte FGDS, l'avait fait en fonction du système présidentialiste si particulier à la Constitution actuelle (2). Or, les textes de 1958 et 1962 avaient toujours été franchement combattus par Mitterrand : à celui-ci on peut alors reconnaître, certes, le démérite, tout républicain, d'avoir abaissé la France, mais en même temps il eut le mérite de s'être coulé dans le moule institutionnel, de l'avoir même préservé et fait avaliser par une gauche si réticente, et même si franchement hostile, pendant un quart de siècle.
En acceptant la cohabitation de 1986, puis celle de 1993, et surtout celle de 1997, les soi-disant héritiers du gaullisme ont, au contraire, fait dériver totalement leur propre doctrine institutionnelle. L'idée d'un accord entre le chef de l'État et « le peuple dans ses profondeurs » n'existe absolument plus. Le clan chiraquien accepte seulement désomais d'accorder un financement au candidat de l'UMP en vue de l'élection présidentielle : quel aveu !
Le règne des partis et leurs magouillles est revenu en force.
À un détail près cependant, ces partis et leur règne se révèlent pires encore que ceux de nos républiques défuntes, réputées si funestes. Les partis actuels, ceux de l'établissement, font de l'immobilisme leur doctrine, du déclin national leur programme et du fiscalisme leur pratique.
Qu'on se rassure, dans les grandes lignes, ils sauront tenir ces promesses-là. Si nous n'y prenons pas garde.
JG Malliarakis
©L'Insolent(1) cf. l'article célèbre de Viansson-Ponté dans le Monde du printemps 1968, à la veille des "événements".
(2) Système qui a moins à voir avec le présidentialisme américain qu'avec la république de Weimar. ...Pour commander le livre Socialisme maçonnique ...Pour commander le livre Sociologie du communisme ... ...Pour commander le livre Harmonies économiques ...
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