On ne doit surtout désespérer aucunement de l'identité française. Mais.
Trois idées s'entrechoquent et se donnent rendez-vous, ici et maintenant autour de l'idée nécessaire d'un sursaut national, dernière chance avant une tiers-mondisation socialiste incarnée par Mme Royal appuyée par les éléphants.
La première nous vient brutalement avec l'annonce affreuse de cet attentat d'Arabie. Quatre Français y ont trouvé la mort, pauvres victimes de l'imbécillité contre-productive de l'islamo-terrorisme. Deux d'entre elles travaillaient pour le groupe français de matériel électrique Schneider, l'autre était enseignant au lycée français de Ryad, le dernier, un jeune homme de 17 ans, innocent comme ses compagnons.
Attardons-nous un instant sur l'illusion fabriquée au Quai d'Orsay, selon laquelle la très intelligente et très sincère politique extérieure héritée du gaullisme met à l'abri nos compatriotes d'une vague, jugée déferlante, mais dont les véritables cibles seraient exclusivement les très méchants Américains. Erreur fatale. Suffisance méprisable.
Mais quand donc comprendront-ils, ces diplomates technocrates en papier mâché, ces douste de rencontre et ces blazy de convenances, l'absence totale de distinguo, au moins à la base, dans la pratique des islamo-terroristes entre les soi-disant intelligents gentils français et les présumées brutes américaines.
À la limite si une distinction demeurait encore, elle se révélerait plus défavorable à la France, plus encore qu'elle ne s'affirma hier face à la Serbie, simple métaphore de l'Europe pendant les 10 années de la tragédie yougoslave, ou qu'elle ne se montre à l'endroit de la Russie. Et cette haine toute spéciale de la France dans la malédiction islamo-terroriste tient non seulement au souvenir des Croisades mais bien plus encore, tout simplement en raison de notre laïcité républicaine.
La frivolité chiraquienne a ainsi surexposé nos compatriotes : j'ose dire ici qu'elle porte une part supplémentaire de responsabilité, comme lorsque le sang français coula en Côte-d’Ivoire en raison des accords imposés à Marcoussis par l'absurde Villepin.
Voici venir la fin de la politique extérieure gaullienne. C'est la deuxième idée.
Il faut cesser de croire qu'elle aura représenté l'alpha et l'oméga de la grandeur. On doit lui reconnaître un vrai grand mérite, au regard de l'Histoire, après avoir ratifié le traité de Rome, signé en 1957 par la IVe république, et que Michel Debré avait promis de déchirer tel un "chiffon de papier", celui d'avoir abouti au traité fondamental franco-allemand de l'Élysée en janvier 1963. Pour tout le reste, et notamment l'illusoire et désastreuse politique africaine on en voit chaque jour l'effondrement tel un château de cartes. Toute cette politique baignée d'idéologie, comme si la substance de la France gagnait quoi que ce soit à se voir dispersée dans des guérillas sud-américaines ou proche-orientales, persiste à refléter non pas un grand et beau rêve national aussi long que l'Histoire, mais une courte et plate nuée égalitaire, et faussement fraternelle. Permettez-moi de lui opposer en réponse cette pensée de Maurice Barrès : "nulle conception de la France ne saurait prévaloir contre la France de chair et d'os".
Là réside une distinction fondamentale entre le nationalisme au sens français du terme, c’est-à-dire au nationalisme tel que le définissait Charles Maurras, et le faux patriotisme républicain mis, par les jacobins, au service d'une conception destructrice de la France : hier les droits de l'Homme réinterprétés à la sauce politiquement correcte, aujourd'hui plus platement et bassement encore, la sécurité sociale, affirmée en septembre 1995 par Jacques Chirac comme nouvelle composante incontournable de l'identité française. Ayant toujours combattu de telles confusions je ne puis qu'en souligner aujourd'hui l'absurdité. Qu'un certain conformisme bourgeois, rhétoriquement droitier, et prétendument "souverainiste," ait cru opportun de s'en emparer à la faveur des débats biaisés sur la constitution européenne m'incite à enfoncer le clou, plutôt qu'à fuir ce débat.
Les hommes de l'État voudraient mettre un point d'honneur à nous faire confondre ainsi la souveraineté, c'est-à-dire le pouvoir que l'administration entend exercer sur le peuple, et à son encontre avec la substance et les destinées de la nation.
Or, troisième idée, on doit tenir l'identité de la France pour bien plus fondamentale que tout échafaudage juridique. Non seulement elle "vient du fond des âges", belle expression de Charles de Gaulle, mais elle s'incarne dans une culture. Nul besoin de la rendre captive d'une ossature institutionnelle. Les rois ont, dit-on, "fait la France", parce que le peuple dans ses profondeurs l'a voulu et parce qu'un contrat plusieurs fois séculaire associait la monarchie capétienne aux libertés françaises. Quand l'État s'est enfermé dans la courtisanerie, et les prébendes subséquentes, il a perdu sa légitimité : je pense, pour ma part, que depuis 1789 il ne l'a jamais vraiment retrouvée parce qu'à l'oppression des privilèges et des vanités, changeant à peine de titulaires, se sont ajoutées les carcans de l'idéologie égalitaire en façade, de la corruption et de la démagogie. La gauche caviar s'est substituée aux talons rouges, nous n'y avons rien gagné.
On ne doit surtout désespérer aucunement de l'identité française. Je recommande même aujourd'hui, comme un bain de jouvence, l'excellent, le délicieux film consacré à Molière (1). Malgré quelques points faibles il nous rappelle ce que la France pourrait redevenir, une terre d'esprit, de joie de vivre et de liberté, au cœur de l'Europe.
JG Malliarakis
©L'InsolentL'Enregistrement de cette libre chronique sera installée chaque matin sur le site d'ARCOLE
(1) Voir le Site officiel du film et sur "Allo Ciné"